Domenico di Bartolo (Asciano, vers 1400/1404 – Sienne, vers 1445/1447)
Pranzo dei poveri ou Banchetto dei poveri (Le Repas, ou Le banquet des pauvres), vers 1443/1444.
Fresque
Provenance : In situ.
Sienne, Santa Maria della Scala.
L’histoire nous apprend que, trois fois par semaine, les dimanches, mercredis et vendredis, un déjeuner était offert aux pauvres. C’est ce déjeuner (ou ce banquet) qui est le sujet de la dernière fresque du cycle.
L’œuvre occupe une place stratégique. Elle est peinte au-dessus de la porte située dans l’axe de la longue galerie qui permet d’atteindre la salle appelée Passeggio après avoir traversé le Pellegrinaio où nous nous trouvons. Cet axe de passage, constamment utilisé, de nos jours comme aux origines, est nécessairement emprunté par toute personnes venue visiter Santa Maria della Scala. La fresque est donc particulièrement exposée aux regards.
Au centre, le Recteur, dont c’est la septième apparition dans cette salle, accueille un pauvre à demi dénudé et dans une attitude qui rend manifeste, non sans une sorte d’excès, l’extrême dénuement dans lequel il se trouve. L’accolade ostentatoire du Recteur qui l’accueille semble elle aussi d’autant plus excessive que le contraste entre la nudité famélique de l’un et l’opulence de l’autre est saisissant. Cette sollicitude du Recteur pour le pauvre homme, affichée avec une emphase quelque peu exagérée, s’explique sans aucun doute par le fait qu’il se sait déjà observé par la postérité et qu’il a la volonté de laisser un portrait de lui-même vu sous son meilleur angle, en donnant à son geste une valeur exemplaire que l’on imagine très supérieure à celle observée dans la réalité quotidienne.
Comme toutes les autres scènes peintes par Domenico di Bartolo, celle-ci est une nouvelle fois minutieusement décrite : la table a été dressée en U pour faciliter le service et les convives se sont répartis tout autour, dos au mur, sur une estrade de bois du type de celles que l’on rencontre encore dans les réfectoires des couvents (elle permet de ne pas souffrir du froid l’hiver). Le ballet des garçons de salle a déjà commencé. A gauche, un frère pousse vers la salle un serviteur portant un plateau chargé de victuailles et l’on voit en divers endroits du réfectoire des garçons s’occuper des convives. A droite, un groupe de jeunes seigneurs luxueusement vêtus, du type de ceux que nous avons déjà rencontrés dans le contexte des fresques précédentes, vient sans doute exprimer une nouvelle fois le rôle que l’aristocratie fortunée joue à Sienne en finançant les actions de charité organisées à l’Ospedale.
Et puis, il y a cette plaie béante dans la fresque, occasionnée par l’ouverture d’une fenêtre aujourd’hui rebouchée, et qui nous empêche à jamais de comprendre précisément ce qui se passait à la table qu’elle dissimule.