Sources écrites de l’épisode de l’Annonce à la Vierge de sa mort prochaine

Les Évangiles n’évoquent pas les dernières années de la vie de la Vierge et donc pas davantage cette scène qu’il faut aller chercher parmi les sources apocryphes, notamment dans le Transitus Mariae (le “passage” de Marie), un ouvrage du IIe siècle attribué à l’évêque Méliton de Sardes. Le Transitus Mariae est le texte le plus courant de l’histoire de la Dormition et de l’Assomption de la Vierge.

Ce texte rapporte que l’ange Gabriel serait apparu une seconde fois à la Vierge pour lui annoncer sa mort prochaine. Celle-ci demanda alors à être assistée par les apôtres lors de son “passage”. Les disciples de Jésus étaient réputés, à cette époque, évangéliser les populations “en Judée et dans les régions voisines”. La légende dit qu’ils furent ramenés auprès de la Vierge en étant portés par des “nuées blanches” [1] qui fonctionnèrent à la manière de tapis volants. La Vierge put donc rendre l’âme en leur présence.

C’est Jacques de Voragine qui nous donne le texte le plus complet sur le sujet de l’Annonce de la mort de la Vierge Marie et, plus généralement, sur les dernières années de la vie de la Vierge, prenant vraisemblablement appui sur les textes, rédigés avant lui, par le Pseudo-Jean au Ve siècle, le Pseudo-Jacques et le Pseudo-Méliton au VIe siècle. Ceux-ci relatent, avec de légères variantes, ces mêmes dernières années qui conduisent la Vierge Marie vers l’Assomption.

Jacques de Voragine, La légende dorée, chapitre 115, “L’Assomption de la sainte Vierge Marie” :

“[…] Un jour enfin, comme le désir de revoir son fils agitait très vivement la Vierge et la faisait pleurer très abondamment, voici qu’un ange entouré de lumière se présenta devant elle, la salua respectueusement comme la mère de son maître, et lui dit : « Je vous salue, Bienheureuse Marie ! Et je vous apporte ici une branche de palmier du paradis, que vous ferez porter devant votre cercueil, dans trois jours, car votre fils vous attend près de lui ! » Et Marie : « Si j’ai trouvé grâce devant tes yeux, daigne me dire ton nom ! Mais, surtout, je te demande avec instance que mes fils et frères, les apôtres, se rassemblent autour de moi, afin que je puisse les voir de mes yeux avant de mourir, et rendre mon âme à Dieu en leur présence, et être ensevelie par eux ! Et je te demande encore ceci : que mon âme, en sortant de mon corps, ne rencontre aucun méchant esprit, et échappe au pouvoir de Satan ! » Et l’ange : « Pourquoi désirez-vous savoir mon nom, qui est grand et admirable ? Mais sachez qu’aujourd’hui même tous les apôtres se réuniront ici, et que c’est en leur présence que s’exhalera votre âme ! Car celui qui, jadis, a transporté le prophète de Judée à Babylone, celui-là n’a besoin que d’un moment pour amener ici tous les apôtres. Et quant au malin esprit, qu’avez-vous à le craindre, vous qui lui avez broyé la tête sous votre pied, et l’avez dépouillé de son pouvoir ? » Cela dit, l’ange remonta au ciel ; et la palme qu’il avait apportée brillait d’une clarté extrême. C’était un rameau vert, mais avec des feuilles aussi lumineuses que l’étoile du matin. […]”

Selon la recommandation du même Jacques de Voragine, on peut également lire le texte du Pseudo-Jean sur le même événement :

APPARITION DE L’ARCHANGE GABRIEL

3) Un jour, un vendredi, Marie se rendit comme d’habitude auprès du tombeau.

Pendant qu’elle priait, les cieux s’ouvrirent, et l’archange Gabriel descendit vers elle et lui dit :

« Salut, ô toi qui as donné naissance au Christ, notre Dieu ! Ta prière, parvenue aux cieux auprès de celui qui est né de toi, a été exaucée. Dans peu de temps, selon ta demande, tu laisseras le monde, tu partiras vers les cieux, auprès de ton fils, pour la vie véritable et éternelle. »

4) Ayant entendu les paroles du saint archange, elle retourna vers la Bethléem, accompagnée de trois jeunes filles, qui la servaient. Après s’être reposée peu de temps, elle se leva et demanda aux jeunes filles : « Apportez-moi un encensoir afin que je prie. » Celles-ci le lui apportèrent comme elle le leur avait ordonné.

5) Et elle adressa une prière, disant :

« Mon Seigneur Jésus Christ, toi qui as daigné dans ta grande bonté être enfanté par moi, écoute ma voix et envoie-moi ton apôtre Jean, pour que sa vue me procure les prémices de la joie.

Envoie-moi aussi tes autres apôtres, soit ceux qui sont déjà arrivés près de toi, soit ceux qui sont encore dans ce siècle, quel que soit l’endroit où ils se trouvent par ton saint commandement, afin que je puisse, en les voyant, bénir ton nom célébré par de nombreux hymnes. J’ai confiance, parce qu’en toute chose tu écoutes ta servante. »

[1] Jacques de Voragine, La Légende dorée, chapitre 115.