Giovanni di Paolo, “De Kruisiging”

Giovanni di Paolo (Sienne 1403 – 1482)

Crucifixion de Jésus avec Marie, Jean, Marie Madeleine, saint Longin et le centurion converti, vers 1447–1465.

Compartiment central de la prédelle du retable de la Présentation de Jésus au Temple (Sienne Pinacoteca Nazionale), tempera et or sur panneau, 29 x 62 cm.

Provenance :

Amsterdam, Rijkmuseum, dépôt du Museum Catharijneconvent.

Alors qu’à Florence, en ce milieu du XVe siècle, les murs se couvrent d’images dans lesquelles les artistes rivalisent d’inventivité pour y simuler le réel et ainsi, y « ouvrir des fenêtres »  sur le monde, le goût médiéval pour les scènes subtilement colorées sur un fond d’or (le plus souvent traité comme une pièce d’orfèvrerie) perdure à Sienne plus longtemps qu’ailleurs.

Cette scène de Crucifixion en est un exemple d’autant plus frappant qu’il montre à quel point l’élégance des formes et des couleurs ne contredit nullement l’effet dramatique recherché. Giovanni di Paolo obtient cet effet au moyen d’une composition rigoureusement fondée sur la géométrie : entouré d’une foule de personnages répartie en deux groupes, le Christ crucifié est maintenu dans un isolement que vient souligner la position de la croix exactement sur l’axe de symétrie qui, par définition, divise aussi la surface en deux parties égales, tout en n’appartenant ni à l’une, ni à l’autre. Seul à se détacher en hauteur sur le fond d’or, Jésus meurt dans une solitude qu’il aura éprouvée comme un abandon.

Chacun à sa place, séparés dans la composition, les deux groupes qui se répartissent de part et d’autre sont également différenciés : à gauche, les proches du Crucifié, tous nimbés d’une auréole, entourent Marie que l’on voit défaillir à la vue du hideux spectacle ; à droite, les persécuteurs sont évidemment privés de l’auréole. Sauf l’un d’eux, le cavalier situé à proximité de la croix. Il s’agit du centurion que l’agonie du Christ vient de convertir. Faisant écho symétriquement à la figure de Longin, lui aussi monté à cheval, il illustre déjà le pouvoir que possède le spectacle de l’agonie du Christ sur les esprits. De ce point du vue, l’attitude du vieillard levant les bras au ciel est peut-être symptomatique des interrogations et des doutes qui s’emparent maintenant du groupe auquel il appartient.

Le paysage sur lequel la nuit tombe, infini et sombre, dans lequel chaque détail, pourtant, rappelle le doux pays siennois, barre l’horizon comme un bandeau de deuil.