Lorenzo di Pietro, dit ‘Il Vecchietta’ (Premières années du XVe siècle – 1480)
Montée au Calvaire, vers 1446.
Caisson du vantail gauche de l’Arliquiera (armoire-reliquaire) de l’Ancienne Sacristie de l’Ospedale di Santa Maria della Scala, tempera et or sur panneaux, 273 x 187 cm. (volets fermés).
Inscriptions : /
Provenance : Ospedale di Santa Maria della Scala, Sienne.
Sienne, Complesso Museale di Santa Maria della Scala, Vecchia Sagrestia.
Dans un petit format parfaitement maîtrisé, Vecchietta, auteur du projet, même s’il laisse le soin à son atelier de le réaliser, parvient à représenter dans un arrière plan qui paraît lointain le cortège qui, après avoir franchi les portes Jérusalem et contourné une colline, se dirige maintenant vers le calvaire où ont lieu toutes les exécutions des condamnés à mort. Ce cortège, il n’est pas long. Il est seulement vu à deux moment distincts de son parcours, avant de passer la colline, et après. Dans cet intervalle spatial, c’est aussi un intervalle de temps qui s’est écoulé. Ainsi la durée est-elle devenue visible.
La violence n’est pas absente et s’observe au premier plan de la scène maintenant que le cortège est parvenu jusqu’à nous : ainsi le geste du personnage qui, conduisant le Christ à l’aide d’une laisse passée autour du cou, tire-t-il sur cette corde comme il le ferait pour faire avancer un âne qui refuserait obstinément de se déplacer ou d’accélérer le rythme, tandis qu’un second personnage, vêtu de jaune et placé derrière le condamné, le pousse vers l’avant avec la même intention, tous deux semblant répondre à l’ordre insensé donné par le centurion vêtu à la mode médiévale et monté sur un cheval cabré, l’homme et le cheval semblant l’un et l’autre courroucés et probablement pressés d’en finir. Face au spectacle, la Vierge submergée par la douleur lève les bras vers le ciel, et Madeleine donne libre court à un insurmontable chagrin.
L’histoire de la Passion peinte par Vecchietta et son atelier s’achève là. La suite demeurera en suspension. Qu’importe, dira-t-on, tout le monde la connaît et elle est d’ailleurs figurée avec abondance et à peu près partout dans ce XVe siècle siennois, y compris dans la Sacristie à laquelle sont destinés les vantaux de l’armoire-reliquaire. De fait, une Crucifixion et une Résurrection figurent sur la face antérieure du châssis de ces vantaux. Ces deux scènes, visibles en permanence au sommet des vantaux fermés, fonctionnent dans ce contexte visuel comme le couronnement d’une série de figures de saints qu’elles viennent, par leur interrelation avec eux, authentifier et légitimer dans leurs propre statut de saints. Ainsi deviennent-elles l’aboutissement nécessaire de l’histoire de la Passion à chaque fois que les portes de cette même armoire sont maintenues ouvertes. Ainsi, enfin, chaque mouvement d’ouverture des vantaux donnera-il sens à l’organisation générale de la narration. Il n’empêche : dans l’actuelle présentation de l’œuvre qui le met en évidence, ce temps suspendu est d’une nouveauté et d’un effet saisissants ; il permet à chacun de ceux qui observent les panneaux d’achever eux-mêmes le récit : puissance de l’image …
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