Bartolo di Fredi, “Abramo si divide da Lot nella terra di Canaan”

Bartolo di Fredi (Sienne, 1330 – 1410)

Abramo si divide da Lot nella terra di Canaan (Abraham se sépare de Loth dans la terre de Canaan)

Détail des Storie del Vecchio Testamento (Épisodes de l’Ancien Testament), 1367.

Fresque

Inscriptions :

  • (en bas, dans l’encadrement de la fresque) : « CÔME . ABRAHAM. SI . DIVISE . DA . LOT/H . NELA . TERRA . DI . CANAAN » [1]

Provenance : In situ.

San Gimignano, Collegiata.

Voici venue l’heure de la séparation d’Abraham et Loth, selon une décision qu’ils ont prise communément afin d’éviter la prolongation des querelles survenues entre les bergers chargés de leurs troupeaux respectifs. Les deux hommes, l’un plus jeune que l’autre, tous deux barbus, discutent avec animation à l’arrière-plan. Le bras levé, Abraham accompagne peut-être d’un geste les paroles qu’il prononce (« Si tu vas à gauche, j’irai à droite, et si tu vas à droite, j’irai à gauche »). Au premier plan, après la séparation, Loth poursuit son chemin « vers l’est », en direction de Sodome, dorénavant seul en compagnie de sa femme et de ses deux filles.

Bartolo di Fredi, s’il figure avec précision l’épisode biblique, ne s’embarrasse d’aucune éventuelle préoccupation pour davantage de réalisme historique. Au contraire, la scène nous plonge en plein XIVe siècle [2] et, plus précisément, dans la campagne siennoise, avec ses vallons et ses villes fortifiées qui parsèment l’horizon de leurs silhouettes roses, couleur de brique. Les personnages portent des vêtements au style typique de cette époque : Abraham et Loth ont tous deux revêtu une jupe de couleur portée bas sur les hanches et maintenue par une ceinture dissimulée sous un rabat du tissu, qui descend sous le genou. Les autres personnages situés dans le même espace (l’un est vêtu de blanc, l’autre de marron, un troisième, au premier plan, de gris) portent un pardessus, ou sorte de cape mi-longue très appréciée au XIVe siècle, sans manches et comportant une capuche pointue relevée vers le haut. Tous portent une paire de chaussures singulière, hybride entre chaussettes médiévales à semelles de cuir et souliers à la poulaine (ou souliers à la polonaise [3]) alors très en vogue.

Pour parfaire l’inscription de l’épisode dans un présent qui est aussi celui de l’actualité du spectateur, Bartolo a fait figurer une saynète intemporelle : tandis qu’un agneau s’est agenouillé sur ses pattes avant pour prendre le lait de sa mère, une brebis, qui la précède, s’est retournée pour, comme nous, tout simplement, regarder.

[1] «  Comment Abraham se sépara de Loth dans la terre de Canaan ».

[2] Cette remarque vaut non seulement pour nombre d’autres scènes figurées dans le cycle de l’Ancien Testament mais pour l’immense majorité des scènes bibliques peintes au XIVe siècle.

[3] Les souliers à la poulaine (ou souliers à la polonaise), originaires de France, étaient excessivement allongés, et de forme très pointue (elles pouvaient mesurer jusqu’à 50 cm).