Cenni di Francesco (et Simone Martini), « Madonna col Bambino in gloria »

Cenni di Francesco (Florence, documenté à partir de 1369 – v. 1415)

Madonna col Bambino in gloria (Vierge à l’Enfant en gloire), v. 1413. 

Fresque

Inscription : /

Provenance : In situ.

San Gimignano, église de San Lorenzo in Ponte.

Le type iconographique de la Vierge en gloire nécessite que l’image, essentiellement caractérisée par l’immobilité – le personnage assis sur un trône est parfaitement impassible -, permette au fidèle de porter sur elle le regard contemplatif qu’exige un tel sujet. La lenteur sied à la majesté. De la même manière, la contemplation suppose un temps d’arrêt. Rien d’étonnant, donc, au fait que la composition de l’œuvre prenne appui sur le principe d’une stricte symétrie, propre à figer toute idée de mouvement.

L’immense mandorle lumineuse dans laquelle la Vierge a pris place occupe la plus grande partie de l’espace disponible. Marie est figurée à une échelle qui rend manifeste le statut qui est le sien dans l’univers où elle règne, ainsi que le rappellent les deux anges qui maintiennent une couronne au-dessus de sa tête.

Le détail du visage de la Vierge, tel que nous le voyons encore, possède une longue histoire. On s’accorde à dire qu’il aurait été peint en 1310 par Simone Martini, alors tout jeune, avant qu’il n’intervienne au Palazzo Pubblico de Sienne pour y exécuter la magistrale la Maestà. L’image votive de cette Vierge, peinte en extérieur, sur le flanc de gauche de l’église, a rapidement fait l’objet d’une importante dévotion populaire. Cette ferveur a d’abord justifié la construction du premier portique visant à la mettre à l’abri des intempéries. C’est encore elle qui, un siècle plus tard, l’a préservée de la destruction complète, dans des conditions qui nous sont mal connues. Que restait-il de l’œuvre de Simone Martini lorsque Cenni di Francesco fut appelé à travailler sur place ? Quoi qu’il en soit, ce visage, probablement déjà très détérioré, a été respectueusement conservé et intégré dans la nouvelle fresque de Cenni.

Autour de la Vierge, selon le même principe géométrique mais avec de discrètes variations, les anges sont disposés comme si ils se faisaient écho en s’inversant symétriquement. Les dissymétries sont infimes. Elles tiennent essentiellement aux deux couleurs rouge et vert, omniprésentes dans l’œuvre mais que l’on retrouve systématiquement inversées sur les ailes des anges, et à la forme des instruments dont jouent certains d’eux tandis que les autres sont en adoration. Ces dissymétries viennent contrebalancer l’extrême rigueur de la composition, l’adoucir et y ajouter une part d’harmonie et de musicalité qui ont évidemment tout à voir avec le sujet représenté.

Un seul personnage est véritablement représenté en mouvement : l’enfant. Penché sur les genoux de sa mère, visiblement animé, il joue avec un oiseau tout en veillant à plonger son regard dans celui du spectateur. Lui seul vient rompre l’immobilité de la composition. Les personnages angéliques qui entourent la mandorle où règne la Reine des cieux sont demeurés, quant à eux, entièrement figés : leurs attitudes et leurs gestes conservent la pause dans un impeccable arrêt sur image. Dans leur fixité, on dirait que les instrumentistes qui se dissimulent parmi eux (ils jouent majoritairement sur des instruments à vent), semblent vouloir tenir la note. À la manière des grandes orgues parvenues au final, chacun d’eux fait durer le son de son instrument le temps d’un long accord plaqué, un accord que l’on ne peut imaginer autrement que parfait.