Antonio Federighi, “Junius Lucius Brutus”

Antonio Federighi (Sienne, 1420-1425 – 1483)

Junius Lucius Brutus, 1459 – 1464.

Marbre de Carrare.

Provenance : In situ.

Sienne, Loggia della Mercanzia.

Après la découverte d’un complot visant à restaurer la monarchie en rendant le trône à Tarquin, complot dans lequel ses propres fils du consul Junius Lucius Brutus sont compromis, les traîtres sont condamnés au supplice de la décapitation ; « […] ce supplice fut d’autant plus remarquable, dit Tite-Live [1]Tite-Live, Histoire romaine, Livre II, chap. III-V (trad. Désiré Nisard), Paris, Firmin Didot frères, 1868., que le consulat imposa à un père [Brutus lui-même] l’obligation de faire donner la mort à ses propres enfants, et que le sort choisit précisément pour assister à l’exécution celui qui aurait dû être éloigné d’un pareil spectacle ».

Machiavel commentant à son tour Tite-Live [2]Nicolas Machiavel, Discours sur la première décade de Tite-Live (1512-1517), Livre troisième, Chapitre 3 (traduction de Jean-Vincent Périès, 1825., tire avec force de cet événement une conclusion qui a pu inspirer les promoteurs du programme iconographique : « Ceux qui auront fait une lecture attentive des événements de l’antiquité demeureront convaincus d’une vérité : c’est que, lorsqu’un État éprouve une révolution, soit qu’une république devienne tyrannie, soit qu’une tyrannie se change en république, il est nécessaire qu’un exemple terrible épouvante les ennemis du nouvel ordre de choses. Celui qui s’empare de la tyrannie et laisse vivre Brutus, celui qui fonde un État libre et n’immole pas les fils de Brutus, doit s’attendre à une chute prochaine ».

Au centre de la série des cinq portraits, tenant encore dans la main droite le stylet avec lequel il a signé la sentence fatale, la figure de Brutus, symbole d’une sévérité vraiment romaine, détourne fixement son regard vers le ciel et, souverainement, fait mine d’ignorer les têtes de ses deux fils qui ont roulé à ses pieds, soulignant ainsi le rôle de justicier joué par un père inaccessible à toute pitié face au sort de ses propres enfants, privilégiant l’intérêt commun au détriment de l’amour filial.

Notes

Notes
1 Tite-Live, Histoire romaine, Livre II, chap. III-V (trad. Désiré Nisard), Paris, Firmin Didot frères, 1868.
2 Nicolas Machiavel, Discours sur la première décade de Tite-Live (1512-1517), Livre troisième, Chapitre 3 (traduction de Jean-Vincent Périès, 1825.