‘Il Sodoma’, “Un prete ispirato da Dio porta da mangiare a Benedetto il giorno di Pasqua”

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Giovanni Antonio Bazzi, dit ‘Il Sodoma’ (Vercelli, 1477 – Sienne, 1549)

Un prete ispirato da Dio porta da mangiare a Benedetto il giorno di Pasqua (Un prêtre inspiré par Dieu apporte à manger à Benoît le jour de Pâques), 1505-1508.

Fresque

Inscription (sous la fresque) :

  • “COME UN PRETE ISPIRATO DA DIO PORTA DA MANGIARE A BENEDETTO IL GIORNO DI PASQUA” [1]

Provenance : In situ

Chiusdino (Asciano), Abbazia di Monte Oliveto Maggiore, Cloître principal.

Nous sommes face à un nouvel exemple de l’intelligence formelle avec laquelle Sodoma parvient à tirer parti de la complexité de la surface à peindre dont il dispose.

La lunette est divisée en trois parties par la présence d’une haute fenêtre qui en occupe le centre, et n’offre que deux surfaces verticales séparées et étroites sur lesquelles représenter le miracle. La composition de la scène résout brillamment la difficulté et joue aussi bien de la structure architecturale de la paroi de la lunette que du fait que le spectateur est en mouvement d’un point à un autre.

Procédons, comme nous le faisons depuis le début de ce parcours, dans l’ordre d’apparition des éléments de la représentation au regard du spectateur qui avance dans le couloir du cloître. Nous voyons tout d’abord Benoît installé à une table de fortune afin de prendre un repas que vient de lui apporter un prêtre (la légende dit qu’il a été incité à faire ce geste un jour de Pâque, par Dieu lui-même). Le jeune serviteur du prêtre sert à boire au Saint, tandis que ce dernier semble retrousser ses manches pour entamer le repas. Sur la droite, nous voyons le prêtre agenouillé respectueusement devant Benoît, le chapeau sur la poitrine. Tous les deux s’apprêtent à partager le repas, ainsi que l’indique la présence de deux couteaux et de deux verres.

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Continuons notre chemin. Après être passés devant la fenêtre, aujourd’hui condamnée, (ses embrasures sont ornées d’arabesques végétales et de médaillons dans lesquels on aperçoit des figures de moines), nous voici parvenu au moment de l’histoire qui aurait dû, selon la chronologie, précéder celui que nous venons d’examiner.

Nous retrouvons le prêtre précédemment rencontré. On ne peut se tromper : dans cette série narrative, les personnages conservent leur vêtement à l’identique afin de faciliter leur identification au fur et à mesure de l’avancée du récit. Dans le même esprit, nous avons déjà pu constater que Benoît n’était plus l’adolescent rencontré depuis le début de l’histoire ; il a maintenant l’apparence d’un jeune homme.

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Visiblement, le prêtre se trouve dans une situation particulière. La main en visière sur le front, il observe intensément quelque chose que nous ne voyons pas dans la fresque, une apparition éblouissante au point qu’il faille s’en protéger les yeux. Souvenons-nous que la fenêtre n’a pas toujours été condamnée et qu’un visiteur de l’époque, où un moine levant les yeux vers l’image, devait lui-même être aveuglé par la lumière naturelle pénétrant à travers elle.

De fait, au sommet de l’embrasure de cette fenêtre, dans le médaillon central, apparaît l’image du Christ. Le torse pivotant en direction du prêtre, il s’adresse à celui-ci en cet instant précis, sur un mode qui n’incite pas à tergiverser. Devenant témoin de la scène, le spectateur se trouve lui-même en situation d’assister à l’apparition miraculeuse.

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Non loin de là, dans la cuisine du prêtre qui communique directement avec sa chambre, le jeune serviteur s’affaire maintenant devant la cheminée pour préparer le repas promis en ce jour de Pâques.

Et nous d’admirer une fois encore l’intelligence plastique grâce à laquelle, prenant en compte aussi bien la structure compliquée du support que la mobilité du spectateur appelé à regarder l’œuvre, Sodoma ajoute à la beauté de l’image le sentiment de durée qui lui fait nécessairement défaut, utilisant l’espace qui lui est offert pour imposer à ce même spectateur les allers et retours indispensables à la compréhension d’un récit qui, de fait, s’accomplit dans une temporalité elle aussi à l’œuvre.

[1] “Comment un prêtre inspiré par Dieu porte à manger à Benoît le jour de Pâques.” L’épisode ne figure pas dans les Dialogues.