« Operaio »

Au Moyen Âge, dans le domaine du travail de la pierre, les noms de magistri operis ou operum, ou operis lapidum ou fabricae, les lapicidae, latomi, operarii, cachent de véritables – et parfois très importants – artistes. Sculpteurs et constructeurs, auréolés du prestige lié à une tradition transmise de père en fils, et après avoir eux-mêmes acquis la maîtrise de leur art et s’être affirmés localement, ils sont alors appelés à transmettre, dans toutes les parties du monde de l’époque, l’empreinte de pratiques artistiques appelées, de ce fait, à devenir universelles [1]Il en va ainsi des Cosmati, des Vassalletti, ….

Il n’est pas rare que de véritables compétitions se livrent entre ces chefs de corporations dans le but d’assurer eux-mêmes la charge de travaux de construction souvent complexes. Sur un plan culturel, les progrès personnels réalisés par ces artisans les orientent peu à peu vers une personnalité artistique qui est celle de l’architecte, comme l’attestent les comptes de construction de la cathédrale de Sienne, publiés par les Milanesi. Leur renommée pouvait s’étendre loin de leur patrie, au point que l’œuvre du français Villard de Honnecourt [2]Villard de Honnecourt (Honnecourt-sur-Escaut [près de Cambrai], v. 1200 – ?, v. 1250 ? : architecte.). Comme tous les compagnons de son temps, il fait son apprentissage en allant de ville en ville et de chantier en chantier. Il deviendra plus tard magister latomus, c’est-à-dire maître d’œuvre, profession qui englobe le métier d’architecte. Son … Poursuivre, par exemple, était recherchée jusqu’en Hongrie. Les maîtres bâtisseurs ont parfois été aimés au point qu’un hommage leur soit rendu au sein même de l’édifice [3]Buste de Mathieu d’Arras dans la cathédrale de Prague, figures des maîtres bâtisseurs gravées dans les médaillons du labyrinthe de la cathédrale d’Amiens et de Reims..

Les informations les plus anciennes concernant une institution responsable de la construction de la cathédrale siennoise remontent à la fin du XIIe siècle. La documentation de la première moitié du XIIIe siècle identifie l’opus Sancte Marie au simple chantier dont la gestion apparaît liée à une « diarchie » entre autorités ecclésiastiques – l’évêque – et autorités laïques – la Municipalité. Cette diarchie prend fin dans la seconde moitié du XIIIe siècle, lorsque la gestion de l’Opéra est réglée par les statuts municipaux et soumise à partir de 1258 au gouvernement d’un operaio unique, nommé par la Municipalité elle-même. Entre les années soixante et la fin du XIIIe siècle, le profil institutionnel de l’Opera se dessine, coïncidant avec la constitution d’un important patrimoine immobilier et la consolidation des ressources financières ; l’operaio cumulant les fonctions de superviseur, de maître d’œuvre et de chef de chantier, est assisté de conseillers et d’un comptable qui sera remplacé par un véritable trésorier (camerlingue) à partir de 1362. Un groupe d’une dizaine de maîtres dans diverses disciplines travaille alors sous la direction de l’operaio.

À partir de la Renaissance, les grands architectes, parce qu’ils furent souvent au départ, comme leurs prédécesseurs, de simples artisans élevés à la dignité d’artiste tout en exerçant les fonctions de maître d’œuvre, s’imprègnent profondément de l’essence du métier ainsi que des traditions de l’art et du langage de la construction. Avec quelques exceptions, ils laissèrent progressivement au capomastro (maître d’œuvre) la fonction d’entrepreneur et de gestionnaire de chantier.

Une fois Sienne rattachée au grand-duché de Toscane, au XVIe s., la maîtrise d’œuvre fut assumée par un Recteur nommé par le Grand-duc, et entouré d’un Conseil de neuf Sages parmi lesquels figurait l’un des chanoines de la Cathédrale. Toutes les responsabilités furent confiées au Recteur, en collaboration avec un comptable chargé des affaires financières et un chancelier des tâches administratives. Avec le statut de 1545, la structure institutionnelle de l’Opera trouve une nouvelle articulation et sa nature juridique reste inchangée jusqu’aux réformes qui ont suivi l’Unité italienne.

Aujourd’hui, l’OPA [4]Il est fréquent que le mot Opera soit remplacé par l’abréviation O₽A, dans laquelle le symbole ₽ est la contraction médiévale de la syllabe per. Ainsi, O₽A = Opera. est administrée par un conseil composé de laïcs et d’ecclésiastiques nommés pour trois ans par le ministre de l’intérieur, sur proposition de l’évêque diocésain, et présidé par un Recteur.

Les archives de l’Opera della Metropolitana conservent la documentation produite par cette institution au cours de son histoire séculaire. Le matériel de nature comptable est presque entièrement conservé à partir de la seconde moitié du XIVe siècle, tandis que celui de nature délibérative, incomplet pour le XVe siècle, assume une continuité depuis le début de l’âge moderne, période où la correspondance a commencé à prendre forme. Les archives contiennent également des partitions musicales et des documents d’intérêt historique, ainsi que des archives provenant de différentes origines : offices publics et ecclésiastiques, personnes et familles. Dans les archives, il y a aussi une petite collection de parchemins volants, datés de 1085, tandis que le noyau beaucoup plus important du Diplomatico est déposé aux Archives d’État de Sienne. Les archives sont dotées d’un inventaire : Stefano Moscadelli (a cura di), « L’archivio dell’Opera della Metropolitana di Siena. Inventario ». München, Bruckmann (coll. Die Kirchen von Siena, 1), 1995.

Voir également : Andrea Giorgi et Stefano Moscadelli, Costruire una cattedrale. L’Opera di Santa Maria di Siena tra XII e XIV secolo, Munich, Deutscher Kunstverlag, (coll. Die Kirchen von Siena, 3), 2005.

Notes

Notes
1 Il en va ainsi des Cosmati, des Vassalletti, …
2 Villard de Honnecourt (Honnecourt-sur-Escaut [près de Cambrai], v. 1200 – ?, v. 1250 ? : architecte.). Comme tous les compagnons de son temps, il fait son apprentissage en allant de ville en ville et de chantier en chantier. Il deviendra plus tard magister latomus, c’est-à-dire maître d’œuvre, profession qui englobe le métier d’architecte. Son activité professionnelle couvre les années 1225 à 1250.
3 Buste de Mathieu d’Arras dans la cathédrale de Prague, figures des maîtres bâtisseurs gravées dans les médaillons du labyrinthe de la cathédrale d’Amiens et de Reims.
4 Il est fréquent que le mot Opera soit remplacé par l’abréviation O₽A, dans laquelle le symbole ₽ est la contraction médiévale de la syllabe per. Ainsi, O₽A = Opera.