Selon les légendes, Acca Larentia (ou Laurentia ou Larentina), présentée tantôt comme la femme d’un gardien de porcs du nom de Faustulus, tantôt comme déesse, est, dans tous les cas, présentée comme la nourrice de Romulus et Rémus.
Selon Tite-Live [1], Acca Larentia était un type de femme que les romains qualifiaient de lupa (« louve »), c’est-à-dire une prostituée, d’où l’histoire légendaire de l’allaitement des jumeaux par la louve.
Pour Aulu-Gelle [2], Acca Larentia est également une prostituée que son commerce a enrichie et qui, à sa mort, lègue sa fortune à Romulus (ou au peuple romain).
Pierre Grimal [3] évoque l’existence, non pas d’une, mais de deux Acca Larentia. D’une part, « la femme du berger Faustulus », nourrice de Romulus et Rémus, d’autre part, « une courtisane qui avait fait des gains immenses dans son commerce », qui était « la plus belle fille de Rome, en ce temps-là », et dont Hercule eut les faveurs à la suite d’un pari gagné.
[1] Tite-Live, Ab Urbe condita libri, I, 4, 5-7 : « Croyant donc remplir la commission royale, ils les abandonnèrent aux premiers flots, à l’endroit où s’élève aujourd’hui le figuier Ruminal, qui porta, dit-on, le nom de Romulaire. Ces lieux n’étaient alors qu’une vaste solitude. S’il faut en croire ce qu’on rapporte, les eaux, faibles en cet endroit, laissèrent à sec le berceau flottant qui portait les deux enfants : une louve altérée, descendue des montagnes d’alentour, accourut au bruit de leurs vagissements, et, leur présentant la mamelle, oublia tellement sa férocité, que l’intendant des troupeaux du roi la trouva caressant de la langue ses nourrissons. Faustulus (c’était, dit-on, le nom de cet homme) les emporta chez lui et les confia aux soins de sa femme Larentia. Selon d’autres, cette Larentia était une prostituée à qui les bergers avaient donné le nom de Louve ; c’est là l’origine de cette tradition merveilleuse. Telles furent la naissance et l’éducation de ces enfants. À peine arrivés à l’âge de l’adolescence, ils dédaignent l’oisiveté d’une vie sédentaire et la garde des troupeaux ; la chasse les entraîne dans les forêts d’alentour. Mais, puisant dans ces fatigues la force et le courage, ils ne se bornent plus à donner la chasse aux bêtes féroces ; ils attaquent les brigands chargés de butin, et partagent leurs dépouilles entre les bergers. Une foule de jeunes pâtres, chaque jour plus nombreuse, s’associe à leurs périls et à leurs jeux ».
[2] Aulu-Gelle, Nuits attiques, VII-7 : « Quant à Acca Larentia, c’était une courtisane qui avait fait des gains immenses dans son commerce ; par testament, selon l’historien Antias, elle institua Romulus son héritier ; selon d’autres, le peuple romain. Pour montrer leur reconnaissance, les Romains décrétèrent qu’un sacrifice aux frais de l’Etat lui serait offert par le flamine Quirinal ; que dans les fastes un jour lui serait consacré. Mais Sabinus Massurius, dans le premier livre de ses Mémoires, adoptant l’opinion de quelques historiens, prétend qu’Acca Larentia fut la nourrice de Romulus : « Cette femme, dit Sabinus, mère de douze fils, en perdit un, dont Romulus prit la place, et fut nourri par Acca ; dans la suite, Romulus donna à ses frères le nom de frères Arvales, et prit ce nom lui-même. Telle est l’origine du collège des frères Arvales, composé de douze pontifes. Les insignes de ce sacerdoce sont une couronne d’épis et des bandelettes blanches. »
[3] Pierre Grimal, Dictionnaire de la mythologie grecque et romaine. Paris, P.U.F, 1965, pp. 5-6 (article « Acca Larentia » : « Sous le règne de Romulus, ou bien celui d’Ancus Marcius, un jour de fête, le gardien du temple d’Hercule à Rome, invita le dieu lui-même à prendre part à un jeu de dés, à condition que le vainqueur fournirait à l’autre un repas et une belle fille. Le dieu accepta et gagna la partie ; le gardien lui offrit un repas dans le temple, et lui procura les faveurs de la plus belle fille de Rome, en ce temps-là, Acca Larentia. Lorsque Hercule la quitta, il lui conseilla, comme récompense, de se mettre au service du premier homme qu’elle rencontrerait. Cet homme fut un Étrusque, du nom de Tarutius, qui l’épousa. Tarutius était fort riche, et il ne tarda pas à mourir. Acca Larentia hérita de sa fortune, qui consistait en vaste domaines, voisins de Rome. Elle-même, à sa mort, les légua au peuple romain. Cette version de la légende a été évidemment inventée pour donner des titres juridiques à la possession de territoires revendiqués par Rome. Dans sa vieillesse, Acca Larentia disparut sans laisser de traces, au Vélabre, à l’endroit même où était enterrée l’autre Larentia, la femme de Faustulus. »