Antonio Federighi, “Eroi romani”

Antonio Federighi (Sienne, entre 1420 et 1425 – 1483)

Eroi romani (Cinq héros romains), v. 1458 – v. 1462.

Banc de marbre,

Provenance : In situ.

Sienne, Loggia della Mercanzia.

L’œuvre prend la forme d’un banc dont on ne tarde pas à comprendre que le rôle, loin d’être limité à une fonction utilitaire de siège, laquelle serait d’ailleurs inconfortablement remplie, est bien davantage destiné à rappeler aux visiteurs, et plus encore aux juges venus rendre la justice en ces lieux, quelles sont les valeurs auxquelles se référer dans l’exercice de leur mission. Comme à l’intérieur de l’anté-chapelle du Palazzo Pubblico [1]Et comme cela sera le cas, une fois encore, dans voûte de la salle du Consistoire du même Palazzo Pubblico, peinte par Domenico Beccafumi au XVIe s., ces cinq héros romains jouent inlassablement le rôle d’exemple qui est alloué à chacun d’eux, avertissant symboliquement les édiles en charge des intérêts de la cité. [2]Voir R. Guerrini, Scrittoio, note 33.

Héros romain.
Furio Camillo.
Héros romain.
Junius Lucius Brutus.
Héros romain.

Bien que non documentée, l’œuvre est traditionnellement attribuée à Federighi, ainsi que pourrait le confirmer un paiement du 11 juillet 1459 pour cinq blocs de marbre de Carrare [3]Richter, 1985, pp. 47 sq.. Le dossier du banc comporte cinq cadres dans lesquels sont représentés cinq héros romains assis. Dans les cinq autres cadres situés au revers du dossier se trouvent quatre écus vides entourés de guirlandes et, au centre, la Lupa che allatta Romolo e Remo (La Louve allaitant Romulus et Remus), symbole de la cité emprunté à la Ville éternelle. Il est possible que le rôle de Federighi se soit limité à l’élaboration du projet, l’exécution étant assurée par les collaborateurs de l’atelier [4]Richter, 1985, p. 53 ; Lucarelli, 1985..

Roberto Guerrini, “Fluc[tus]. Intertestualità ed iconografia nella tradizione classica”, Lexis: poetica, retorica e comunicazione nella tradizione classica (atti del Convegno internazionale Intertestualità: il dialogo fra testi nelle letterature classiche, Cagliari, 24-26 novembre 1994). A.M. Hakkert, 1995, pp. 233-273.(http://www.lexisonline.eu/wordpress/wp-content/uploads/2016/07/Lexis13_Guerrini.pdf).

Les accoudoirs

Le thème laïc des héros antiques, figuré sur le dossier du banc de marbre, trouve un prolongement dans les deux splendides nus (privés de têtes) qui, allongés paresseusement tout du long, ornent les accoudoirs. Ces deux figures représentent à elle deux le mythe d’Hercule et Omphale [5]Selon la légende, c’est l’oracle d’Apollon qui prescrivit à Héraclès (Hercule) de se vendre comme esclave à Omphale, reine de Lydie, afin de se purifier du meurtre particulièrement honteux d’un certain Iphitos. Après qu’il ait exécuté les douze travaux, proprement herculéens, auxquels il avait été condamné, la reine libéra le héros … Poursuivre, qui semble agir ici comme un contrepoint aux valeurs héroïques portées par les cinq héros avoisinants.

Notes

Notes
1 Et comme cela sera le cas, une fois encore, dans voûte de la salle du Consistoire du même Palazzo Pubblico, peinte par Domenico Beccafumi au XVIe s.
2 Voir R. Guerrini, Scrittoio, note 33.
3 Richter, 1985, pp. 47 sq.
4 Richter, 1985, p. 53 ; Lucarelli, 1985.
5 Selon la légende, c’est l’oracle d’Apollon qui prescrivit à Héraclès (Hercule) de se vendre comme esclave à Omphale, reine de Lydie, afin de se purifier du meurtre particulièrement honteux d’un certain Iphitos. Après qu’il ait exécuté les douze travaux, proprement herculéens, auxquels il avait été condamné, la reine libéra le héros de son esclavage, et l’épousa. Dans la littérature antique, ce mythe de soumission d’un héros particulièrement viril aux caprices d’une femme en guise d’expiation d’un crime, apparaît chez Sophocle, avant d’être développé par d’autres auteurs (tel Ovide, sur un mode humoristique) jusqu’à mettre en scène une inversion symbolique des rôles au sein du couple. On le trouve, sur un mode sexuellement très ambigu, dans un texte de Lucien de Samosate : « Tandis qu’Omphale, couverte de la peau du lion de Némée, tenait la massue, Héraclès, habillé en femme, vêtu d’une robe de pourpre, travaillait à des ouvrages de laine, et souffrait qu’Omphale lui donnât quelquefois de petits soufflets avec sa pantoufle » (Lucien de Samosate, Comment il faut écrire l’histoire, X.).