Bartolomeo Bulgarini (documenté à Sienne de 1337 à 1378)
Madonna Assunta in cielo da un coro di Angeli (La Madone est emportée au ciel par un chœur d’anges),
Tempéra sur bois, 205 x 112 cm.
Provenance : Hôpital de Santa Maria della Scala, Sienne.
Sienne, Pinacoteca Nazionale.
Dans les écoinçons que dessinent la charpenterie de l’encadrement, une foule de prophètes et de patriarches (fig. 1), identifiables aux banderoles (cependant illisibles) qu’il arborent devant eux, assistent à l’événement. Des anges musiciens (fig. 3 et 4), plus bas, accompagnent la scène d’une mélodie. Le modèle, une fois encore, est emprunté à la fresque peinte par Simone Martini (reprise par Sassetta et achevée par Sano di Pietro) dans une niche construite contre la paroi d’entrée de l’Antiporto di Camollia. La Vierge, assise sur un trône formé par des anges est emportée vers les cieux, sous le regard attentif des prophètes serrés dans les écoinçons.
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Ruisselante d’or, l’image est noyée dans une lumière dont les éclats se reflètent sur une surface picturale devenue éblouissante, et rendent l’observation du détail difficile (pour ne rien dire de la prise de vue nécessaire à ce guide …). Cette difficulté à voir constitue paradoxalement l’une des réussites de l’œuvre : celle-ci évoque un mystère par nature invisible, sauf peut-être avec les yeux de la foi (et à défaut, le cas échéant, grâce à sa représentation picturale, ce qui a pu faire dire que la peinture rendait visible l’invisible). Il s’agit de l’Assomption de la Vierge (fig. 1), vers un Paradis qui, selon les Apocryphes [1] est aussi le Royaume sur lequel elle est appelée à régner. La foi, qui permet la croyance, n’est pas, on le sait, donnée à tout le monde. Elle nécessite ce que d’autres textes qualifient de « simplicité d’esprit », ou, à défaut, des preuves.
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C’est ainsi que Thomas (fig. 2), absent lors de l’événement de l’Assomption contrairement aux autres apôtres, comme nous le racontent d’autres récits [2], refusa, de même qu’il l’avait déjà fait lors de la Résurrection du Christ, de croire sans preuve à la réalité du miracle. Selon la légende, Marie laissa alors tomber des cieux sa propre ceinture à l’intention de l’apôtre incrédule, preuve qu’elle-même était bien montée aux cieux. En s’approchant de l’œuvre, nous pouvons observer, au bas de la scène, cet épisode qui, de nos jours encore, fait objet d’une dévotion particulière en Toscane (la Sacra Cintola, ou Sainte Ceinture de la Vierge, est conservée dans la cathédrale de Prato [3]). Thomas, vêtu d’un manteau bleu, au milieu d’un chœur d’anges musiciens noyé dans un somptueux fond d’or, accueille, enfin visible, la relique qui tombe des cieux vers ses deux bras tendus.
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[1] PRECISER
[2] Selon un texte apocryphe des Ve et VIe siècles repris dans la Légende dorée, l’apôtre Thomas ne voulant pas croire à l’Assomption de la Vierge aurait fait ouvrir son tombeau et l’aurait trouvé empli de fleurs. C’est au même moment que, levant les yeux au ciel, il aurait vu la Vierge jeter sa ceinture à son intention, preuve incontestable que l’événement avait bien eu lieu.
[3] La Sacra Cintola fait encore l’objet d’une vénération particulière à Prato où elle est présentée par l’évêque de la ville aux fidèles cinq fois par an (à Pâques, le 1er mai, le 15 août, le 8 septembre et à Noël). Le protocole réglé de cette ostentation exige qu’elle soit effectuée, encore de nos jours, du haut de la chaire de Donatello et Michelozzo construite à cet effet à l’angle de la façade de la cathédrale, entre 1428 et 1438.
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