Ancêtres du Christ ou Généalogie de Jésus

La question de la généalogie du Christ a passionné l’Église sur un plan théologique aussi longtemps que cette dernière a cru devoir insister sur les origines royales de celui en qui elle voit le Fils de Dieu, afin de l’honorer. C’est également pour des motifs du même ordre que la représentation des ancêtres du Christ a pris une place particulière dans l’iconographie chrétienne [1]À Sienne et dans le contado, on peut voir plusieurs représentations de la lignée plus ou moins complète des ancêtres du Christ, depuis la plus monumentale (les statues de la façade de la cathédrale), aux plus délicates images brodées (Piviale de Pie II, Pienza, Museo diocesano)..

Le type le plus fréquent de la représentation de cette généalogie divine prend la forme de l’arbre de Jessé.

Origines textuellEs

La généalogie de Jésus fait l’objet de deux passages des évangiles selon Matthieu (Mt 1, 1-17) et Luc (Lc 3, 23-38), où elle est présentée respectivement de manière descendante (Matthieu) et ascendante (Luc). Ce n’est pas la seule différence existant entre les deux évangiles, lesquels donnent deux lignées qui ne concordent pas intégralement. Le constat a donné lieu à une glose abondante dont l’une des conclusions souligne que le plus important est que le Christ descende bien de David dans les deux cas, conformément à la promesse de Dieu exprimée par le prophète Isaïe [2]« Un rameau sortira de la souche de Jessé, père de David, un rejeton jaillira de ses racines. Sur lui reposera l’esprit du Seigneur » (Es 11, 1).. C’est sans doute pourquoi Luc insiste un peu sur le lieu de naissance de Jésus, Bethléem, la ville de David.

Matthieu (Mt 1, 1-17) :

« Généalogie de Jésus Christ, fils de David, fils d’Abraham.

Abraham engendra Isaac ; Isaac engendra Jacob ; Jacob engendra Juda et ses frères;

Juda engendra de Thamar Pharès et Zara; Pharès engendra Esrom ; Esrom engendra Aram ;

Aram engendra Aminadabv ; Aminadab engendra Naasson ; Naasson engendra Salmon ;

Salmon engendra Boaz de Rahab ; Boaz engendra Obed de Ruth ;

Obed engendra Isaï [3]Isaï ou Ishaï ou encore Jessé. ; Isaï engendra David. Le roi David engendra Salomon de la femme d’Urie ;

Salomon engendra Roboam ; Roboam engendra Abia ; Abia engendra Asa ;

Asa engendra Josaphat ; Josaphat engendra Joram ; Joram engendra Ozias ;

Ozias engendra Joatham ; Joatham engendra Achaz ; Achaz engendra Ézéchias ;

Ézéchias engendra Manassé ; Manassé engendra Amon ; Amon engendra Josias ;

Josias engendra Jéchonias et ses frères, au temps de la déportation à Babylone.

Après la déportation à Babylone, Jéchonias engendra Salathiel ; Salathiel engendra Zorobabel ;

Zorobabel engendra Abiudv; Abiud engendra Éliakim ; Éliakim engendra Azor ;

Azor engendra Sadok ; Sadok engendra Achim ; Achim engendra Éliud ;

Éliud engendra Éléazar ; Éléazar engendra Matthan ; Matthan engendra Jacob ;

Jacob engendra Joseph, l’époux de Marie, de laquelle est né Jésus, qui est appelé Christ.

Il y a donc en tout quatorze générations depuis Abraham jusqu’à David, quatorze générations depuis David jusqu’à la déportation à Babylone, et quatorze générations depuis la déportation à Babylone jusqu’au Christ.f

Luc (Lc 3, 23-38) :

« Jésus avait environ trente ans lorsqu’il commença son ministère, étant, comme on le croyait, fils de Joseph, fils d’Héli,

fils de Matthat, fils de Lévi, fils de Melchi, fils de Jannaï, fils de Joseph,

fils de Mattathias, fils d’Amos, fils de Nahum, fils d’Esli, fils de Naggaï,

fils de Maath, fils de Mattathias, fils de Sémeï, fils de Josech, fils de Joda,

fils de Joanan, fils de Rhésa, fils de Zorobabel, fils de Salathiel, fils de Néri,

fils de Melchi, fils d’Addi, fils de Kosam, fils d’Elmadam, fils d’Er,

fils de Jésus, fils d’Éliézer, fils de Jorim, fils de Matthat, fils de Lévi,

fils de Siméon, fils de Juda, fils de Joseph, fils de Jonam, fils d’Éliakim,

fils de Méléa, fils de Menna, fils de Mattatha, fils de Nathan, fils de David,

fils d’Isaï [4]Voir note précédente., fils de Jobed, fils de Booz, fils de Salmon, fils de Naasson,

fils d’Aminadab, fils d’Admin, fils d’Arni, fils d’Esrom, fils de Pharès, fils de Juda,

fils de Jacob, fils d’Isaac, fils d’Abraham, fis de Thara, fils de Nachor,

fils de Seruch, fils de Ragau, fils de Phalek, fils d’Éber, fils de Sala,

fils de Kaïnam, fils d’Arphaxad, fils de Sem, fils de Noé, fils de Lamech,

fils de Mathusala, fils d’Énoch, fils de Jared, fils de Maléléel, fils de Kaïnan,

fils d’Énos, fils de Seth, fils d’Adam, fils de Dieu. »

Dans la littérature récente, Giovanni Careri [5]Giovanni Careri, La torpeur des Ancêtres. Juifs et chrétiens dans la chapelle Sixtine, Paris, Éditions de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (« L’histoire et ses représentations »), 2013., en 2013, a proposé une sorte d’« Atlas » [6]Selon la méthode du Bilderatlas (atlas d’images) d’Aby Warburg (Aby Warburg, Mnemosyne Bilderatlas (trad. de l’allemand), L’Atlas mnémosyne : avec un essai de Roland Recht. Paris, L’écarquillé-INHA, 2012., ouvrant de nouvelles pistes de lecture pour éclairer le rôle et la place des ancêtres du Christ dans l’iconographie chrétienne, en soulignant la « torpeur » qui les caractérise dans les figures de la voûte de la Chapelle Sixtine, renvoyant notamment au péché d’« acédie » si critiqué par Savonarole, et qui évoque aussi la mélancolie présente dans les « autoportraits » de Michel-Ange.

Notes

Notes
1 À Sienne et dans le contado, on peut voir plusieurs représentations de la lignée plus ou moins complète des ancêtres du Christ, depuis la plus monumentale (les statues de la façade de la cathédrale), aux plus délicates images brodées (Piviale de Pie II, Pienza, Museo diocesano).
2 « Un rameau sortira de la souche de Jessé, père de David, un rejeton jaillira de ses racines. Sur lui reposera l’esprit du Seigneur » (Es 11, 1).
3 Isaï ou Ishaï ou encore Jessé.
4 Voir note précédente.
5 Giovanni Careri, La torpeur des Ancêtres. Juifs et chrétiens dans la chapelle Sixtine, Paris, Éditions de l’École des Hautes Études en Sciences Sociales (« L’histoire et ses représentations »), 2013.
6 Selon la méthode du Bilderatlas (atlas d’images) d’Aby Warburg (Aby Warburg, Mnemosyne Bilderatlas (trad. de l’allemand), L’Atlas mnémosyne : avec un essai de Roland Recht. Paris, L’écarquillé-INHA, 2012.