Pietro Lorenzetti (connu à Sienne de 1305 à 1345)
Panneaux latéraux de la Pala del Carmine. Madonna in trono col Bambino fra quattro Angeli, San Nicola e il profeta Elia [1], 1329 (datée et signée), tempéra sur panneaux transposé sur toile en 1883 (les dimensions sont indiquées ci-dessous, panneau par panneau.
Provenance : Oratorio della Compagnia di Sant’Ansano, Dòfana, près Sienne. A l’origine, église du Carmine, Sienne.
Sienne, Pinacoteca Nazionale.
Les panneaux indiqués ci-dessous en gras appartiennent à une collection publique américaine et ne sont, hélas, pas exposés ici :
- à gauche du volet central :
- Santa Agnese, 128 x 45 cm. (sur les piédroits de l’arcade : deux demi figures d’anges portant une palme).
En raison de l’assonance de son nom, Agnès était la protectrice des agneaux, à l’instar de celui qu’elle tient dans les bras et qui est également son attribut iconographique. C’est à ce titre également que la chapelle de l’Arte della Lana [1] siennoise lui était dédiée.
Dorénavant, la figure massive et sculpturale de la sainte a pivoté sur elle-même et occupe une espace aux trois dimensions feintes, dans lequel elle paraît évoluer. Il s’agit-là, dans le domaine artistique, d’une véritable révolution.
- Profeta Eliseo, 125,5 x 47 cm. Norton Simon Museum collection, Los Angeles, Southern California ; sur les piédroits de l’arcade : deux demi figures d’anges portant une palme.
La présence du prophète Elisée était tout aussi signifiante que celle de Jean Baptiste dans le panneau de droite. Elie et Elisée ne cessaient, en effet, de presser les successeurs du roi Salomon de se détourner des idoles étrangères et de revenir au seul « vrai Dieu ». Vêtu de l’habit blanc des moines carmélites que nous verrons bientôt accordé par le pape Honorius IV dans la prédelle, il tient également entre les mains un rouleau où l’on peut lire les paroles [2], extraites du deuxième Livre des Rois (2, 11-12), qui évoquent précisément l’enlèvement au cieux d’Elie sur un char de feu.
- à droite du volet central :
- San Giovanni Battista, 126 x 46,5 cm. Norton Simon Museum collection, Los Angeles, Southern California ; sur les piédroits de l’arcade : deux demi figures d’anges portant une palme.
Il importe de mentionner ici le sens particulier que revêt la présence de Jean Baptiste, souvent qualifié de « Second Elie [3]», aux côtés de celui-ci dans le retable. Cette proximité est aussi l’allusion à une autre prophétie, celle de Malachie annonçant le retour d’Elie avant la venue du Messie, retour que l’exégèse chrétienne voit dans la figure du Précurseur, c’est-à-dire Jean Baptiste lui-même. Le geste de Jean Baptiste, aujourd’hui vide de sens en l’absence du panneau central, était dirigé vers Elie afin de confirmer une proximité avec lui autre que seulement spatiale.
- Santa Caterina d’Alessandria, 127 x 46 cm. (sur les piédroits de l’arcade : deux demi figures d’anges portant une palme).
Bien qu’elle ne soit pas accompagnée de la roue dentée, instrument de son supplice, Catherine d’Alexandrie, sainte princesse légendaire est reconnaissable à la couronne qu’elle porte sur la tête et à la jeunesse de la figure qui la représente. Elle porte également la palme du martyre.
En écho à sainte Agnès visible au côté opposé du retable, portant elle aussi une somptueuse robe de tissus rouge couverte d’un manteau de même couleur, brodé aux emmanchures et doublé de fourrure blanche, Catherine d’Alexandrie se tourne à son tour vers la scène figurée dans le panneau principal.
[1] L’Arte della Lana (ou Art de la Laine) était une corporation des arts et métiers, l’un des sept arts majeurs des Arti di Firenze et également le plus puissant de tous.
[2] « Ils étaient en train de marcher tout en parlant lorsqu’un char de feu, avec des chevaux de feu, les sépara. Alors, Élie monta au ciel dans un ouragan. Élisée le vit et se mit à crier : ‘Mon père !… Mon père !… Char d’Israël et ses cavaliers !’ Puis il cessa de le voir. Il saisit ses vêtements et les déchira en deux. » Livre des Rois (2, 11-12).
[3] L’un et l’autre ont pratiqué un ascétisme rigoureux.