Chapelle des Seigneurs du Palais Public
Au début du XVe s., les gouverneurs de la République firent réaménager les espaces intérieurs du premier étage du Palazzo afin de pouvoir consacrer tout l’espace disponible du rez-de-chaussée aux bureaux de l’administration. A cette occasion, il fallu abandonner la chapelle primitive aménagée un siècle plus tôt par les Neuf à côté de l’entrée principale donnant sur le Campo [1]Cette chapelle primitive donnant directement sur le Campo existe toujours. Elle est encore en fonction. et en construire une autre, plus grande que celle du rez-de-chaussée, pour l’usage des gouverneurs logeant dorénavant au premier étage de l’édifice. La partie centrale des espaces nouvellement définis fut consacrée à cet usage. L’épaisse muraille séparant la nouvelle chapelle de la salle de la Mappemonde fut alors percée afin de permettre à lumière du jour d’y pénétrer. De fait, une faible lumière naturelle entre par quatre arches qui prennent le jour sur la salle adjacente, elle-même éclairée par quatre hautes fenêtres donnant sur l’ancien marché. Les deux espaces sont séparés par un mur bas et de faible épaisseur, contre lequel prennent appui quelques unes des stalles du chœur.
L’élégante grille qui, au droit de l’arc doubleau, sépare la chapelle du vestibule n’est pas exactement contemporaine de la réalisation de ce nouvel ensemble. Elle a été exécutée par Giacomo di Vita, dans les années quarante du Quattrocento, peut-être à partir d’un projet dû à Jacopo della Quercia. Cette grille matérialise la transition existant entre les deux espaces contigus, l’un, l’anté-chapelle consacré à une thématique civique et laïque, l’autre à un programme iconographique purement religieux. Au seuil de l’entrée, les figures de Judas Maccabée, à gauche, et Ambrogio Sansedoni, à droite, accompagnent symboliquement le passage de l’espace laïc à celui de la chapelle.
C’est en août 1406 que le Conseil de la ville confie à Taddeo di Bartolo l’exécution, dans la chapelle nouvellement achevée, d’un cycle de fresques dont le sujet est consacré à la Vie de la Vierge. Si cette commande le consacre premier peintre siennois de son temps, le délai dont dispose le peintre pour la réalisation du décor peint est extraordinairement court. Selon Sibilla Symeonides, la nécessité de faire vite est sans doute due à l’arrivée prochaine du pape Grégoire XII dans la cité. « Seul Taddeo, dont la rapidité d’exécution était proverbiale, pouvait entreprendre la tâche dans de pareilles conditions. » Par précaution, cependant, des mesures très rigoureuses furent prises pour s’assurer qu’il s’acquitterait de sa tâche dans les délais imposés. Le peintre se mit au travail dès septembre 1406. D’abord menacé d’amende en cas d’absence, puis empêché de s’absenter avant d’avoir mené la tâche à son terme, Taddeo réalisa l’exploit d’achever les fresques le 8 janvier 1407.
Construite dans un goût encore gothique souligné par l’emploi de voûtes d’ogives, la chapelle a conservé son mobilier original ; celui-ci contribue également à conférer à ce lieu son aspect authentiquement gothique. Cela est vrai plus particulièrement pour les stalles de bois minutieusement sculptées et marquetées par Domenico di Niccolò, entre 1415 et 1428. Sur les dossiers de chacun des vingt et un sièges, sont figurés les articles du Credo. Domenico tira de ce travail exceptionnel une célébrité telle que, depuis cette date, il tient son surnom ‘dei Cori’ (“des chœurs”) du splendide meuble dont il est l’auteur.
Cette salle conserve encore, suspendu à un anneau fixé dans l’arc qui sépare les deux travées de la voûte, un très rare exemple de lustre – malheureusement réduit dans certains éléments -, constitué d’une structure architectonique en bois enrichie de trois statuettes, l’une de San Crescenzio, protecteur de Sienne, et deux autres d’évangélistes non identifiés, au bout d’une longue tige en fer forgé. L’attribution à Domenico di Niccolò lui-même confirme le projet unitaire de l’ensemble du mobilier, fixe et mobile, de la chapelle. 4
Le précieux orgue, à droite de l’autel, date de 1520 environ. Situé sous la voûte de l’arc de séparation entre la Chapelle des Seigneurs et la Salle de la Mappemonde, il est l’un des plus anciens conservés aujourd’hui dans le monde et, du fait de ses caractéristiques techniques et artistiques, d’une importance exceptionnelle dans l’histoire de cet instrument à la Renaissance. Sa construction, votée par le Consistoire de la République siennoise le 19 juillet 1519, est due au maître facteur d’orgues Giovanni d’Antonio Piffaro, l’un des plus anciens et des meilleurs facteurs d’orgue italiens, avec la collaboration de Giovanni di Pietro, dit ‘Castelnuovo’ [2]On ignore tout de la date et du lieu de naissance du peintre Giovanni di Pietro (actif à Sienne au milieu du Quattrocento). La thèse de C. B. Strehlke (Carl Brandon STREHLKE, dans La pittura senese nel Rinascimento, 1420-1500 (cat. d’exp., New York), Cinisello Balsamo, 1989, p. 278.) selon laquelle Giovanni di Pietro doit être identifié à un peintre documenté comme collaborateur de … Poursuivre, pour l’ornementation en bois, et du peintre Ghino d’Antonio, auteur de la dorure de la caisse et de la toile peinte portant la représentation de la louve siennoise recouvrant les tuyaux. La restauration de la toile, jamais touchée par des opérations de conservation jusqu’à présent, et l’extraordinaire manutention opérée sur la partie phonique de l’instrument, tout juste terminé en mai 2022, effectué une quarantaine d’années après la dernière intervention, ont permis la récupération esthétique et fonctionnelle complète du précieux instrument.
Contrairement au reste des éléments de mobilier visibles ici, l’autel de marbre de Marrina, et la peinture du Sodoma représentant La Sacra famiglia con San Leonardo (vers 1530) proviennent du Duomo d’où ils furent apportés ici à la fin du XVIIe s.
Les fresques : organisation du cycle iconographique
Les fresques peintes par Taddeo di Bartolo dans la chapelle (1406) et dans l’anti-chapelle (1413-1414) qui la précède, constituent l’une des manifestations les plus importantes de la dualité des origines revendiquées par la cité de Sienne, dans laquelle coexistent, d’un côté le mythe de Rome, de l’autre, le thème de la Sena vetus civitas Virginis.
Alors que les fresques du vestibule de la chapelle (1413-1414) représentent des héros de la République romaine exemplaires par leurs vertus, celles, antérieures, de la chapelle (1406) illustrent plusieurs épisodes de la vie de la Vierge, avocate et protectrice de la cité.
Taddeo di Bartolo peint l’Annonciation, sur le mur de l’autel, et quatre grandes scènes mariales sur le mur nord : l’Arrivée des apôtres, la Morte della Vergine, les Funérailles de la Vierge, la Résurrection de la Vierge.
Parmi les nombreux saints représentés, on notera, au-dessus de la première arcade ouverte sur la salle de la Mappemonde, le Saint Pierre Alexandrin. Sa présence s’explique par les événements ayant eu lieu peu de temps avant la construction de la chapelle : en 1403, une rébellion, dite “des Douze”, rapidement avortée, eut lieu le jour de la fête du saint. A compter de cette date, le jour de la saint Pierre Alexandrin est devenu jour de fête à Sienne.
L’allure générale de style gothique tardif de l’ensemble pictural ne diminue en rien son caractère monumental.
PAROI NORD
ARC DOUBLEAU CENTRAL
Face est
PAROI EST
PAROI SUD
Arche gauche
Arche droite

PAROI OUEST
Lunette gauche
San Marco e sant’Ambrogio
Écoinçon gauche, médaillon
Giustizia
Lunette droite
San Girolamo e san Luca
Écoinçon droit, médaillon
Vertu ?
- Première travée
- Paroi nord
- Taddeo di Bartolo, Arrivo degli Apostoli
- Taddeo di Bartolo, Dormizione della Vergine
- Taddeo di Bartolo, Funerali della Vergine
- Taddeo di Bartolo, Assunzione della Vergine
- Arche centrale
- Première lunette
- Taddeo di Bartolo, Sant’Agostino e San Giovanni Evangelista
- Seconde lunette
- Arche de l’entrée
- Première lunette
- Seconde lunette
- Intrados de l’arche centrale
- à gauche (nord) :
- à droite (sud) :
- Seconde travée
- Voûte
- Paroi nord
- Paroi est
- Paroi sud
- Arche centrale
Sous l’intrados de la seconde arcade donnant sur la salle de la Mappemonde, dans un encadrement évoquant une forme de tempietto, on aperçoit la Louve siennoise, peinte par Ghino d’Antonio sur la façade de la caisse derrière laquelle est protégé l’orgue :
Les stalles
Les stalles du chœur, exécutées par Domenico di Niccolò (dont elles constituent le chef-d’œuvre), et son disciple Mattia di Nanni [3]Mattìa di Nanni, dit ‘il Bernacchino’ (Sienne 1403 – v. 1433) : sculpteur et marqueteur. Outre sa collaboration avec Domenico di Niccolò sur le chantier des stalles de la chapelle des Seigneurs, on le connait à travers son activité de décorateur à l’intérieur du Palazzo Pubblico pour lequel il exécuta cinq « tondi » avec des figures d’hommes … Poursuivre, entre 1413 et 1428 : le premier des deux a reçu le surnom de Domenico di Niccolò « dei Cori » précisément en raison cette entreprise, même si ses fonctions étaient beaucoup plus larges, comme en témoignent à la fois son statut de sculpteur et son rôle de maître d’œuvre de l’Opera del Duomo. [4]37
À gauche après avoir passé la grille, la porte élaborée sur le même modèle que les stalles est ornée d’une marqueterie représentant la Nativité. Les vingt-et-une stalles, auxquelles il faut ajouter cette porte de communication, présentent ensemble une illustration particulièrement détaillée du Credo, en vingt-deux images. Les versets correspondants apparaissent, tracés sur des phylactères déroulés horizontalement, à la base de chacune des scènes qui ornent les stalles. Pour avoir une approche chronologique de cet ensemble remarquable, il faut commencer par la stalle située à gauche de l’autel puis, après avoir longé toute la paroi gauche jusqu’à la porte mentionnée ci-dessus (n° 11), avant de reprendre à partir de celle (n° 12) située à droite de l’autel et revenir en direction de la grille d’entrée.
Les histoires figurées alternent avec des sculptures élaborées et extrêmement raffinées, tandis que l’utilisation des fibres végétales des diverses espèces utilisées donne à cet ensemble une richesse chromatique inhabituelle. “Il n’est pas surprenant que Pierre le Fruiter dit Salmon, secrétaire et homme de confiance de Charles VI de Valois, arrivé à Sienne au début de 1408, ait été impressionné en voyant la capacité de Domenico dans ce domaine spécifique au point de signaler l’artiste au duc Jean du Berry, oncle du roi, afin de l’inviter à traverser les Alpes afin de travailler pour lui.” [5]Anna Rosa CALDERONI MASETTI, « Concerto d’arti », dans Max SEIDEL (dir.), Storia delle arti in Toscana. Il Trecento, Florence, Edifir – Cassa di Risparmio di Firenze, 2004, pp. 117-146. L’idée demeura sans suite, mais on ne peut ignorer la diffusion de cette prière dans la sphère figurative, attestée par de nombreux exemples, en Italie comme en France, par des … Poursuivre
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Credo in unum Deum
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Patrem Omnipotentem
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Factorem caeli et terrae, visibilum et invisibilium
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Et in unum Dominum Jesum Christum Filium Dei unigenitum
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Et ex Padre natum ante omnia saecula
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Deum de Deo, lumen de lumine, Deum verum de Deo vero
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Genitum non factum, consubstantialem Patri, et par quem omnia facta sunt
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Qui propter nos homines et propter nostram salutem …
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Descendit de caelis
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Et incarnatus est de Spirito Santo
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Ex Maria Virgine, et homo factus est
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Crucifixus etiam pro nobis sub Pontio Pilato
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Passus et sepultus est
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Resurrexit tertia die secundum Scripturas
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Et ascendit in caelum, sedet ad dexteram Patris
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Et iterum venturus est com gloria judicare vivos et mortuos ; cujus regni non erit finis
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Et in Spiritum Sanctum dominum et vivificantem, et. Qui locutus est per prophetas
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Et in unam sanctam catholicam et apostolicam Ecclesiam
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Confiteor unum baptisma
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, In remissionem peccatorum
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Et expecto resurrectionem
- Domenico di Niccolò ‘dei Cori’, Et vitam venturi saeculi. Amen
Le premier retable de l’ancien autel de la chapelle
Simone MartinI e Sano di Pietro, Retable de la chapelle des Seigneurs
Contrairement aux marqueteries marquées par une vision perspective rigoureuse, celles de Sienne, dans lesquelles la figure humaine et les scènes narratives jouent un rôle primordial, sont plutôt liés aux solutions appartenant encore au XIVe siècle, comme dans le Chœur de la Cathédrale de Orvieto, due à Vanni de Tura dell’Ammannato qui y travailla en 1329, avec la collaboration des marqueteurs siennois.39
La critique a depuis longtemps signalé la parenté entre ce superbe travail du bois et l’œuvre de Taddeo di Bartolo, dont les fresques exécutées en 1406-1407 et représentant des Histoires de la Vierge dominent les stalles du chœur de la Cappella de’ Signori. 40 Et ce n’est pas un hasard si neuf tablettes encadrées attribuées au même artiste, ou à un proche disciple, conservées au Museo dell’Opera di Siena, représentent précisément les chapitres du Credo, probablement destinés à décorer la partie supérieure d’un banc de sacristie : bien que certains soient manquants ou ne s’ordonnent pas, le choix de la gamme chromatique, restreinte et maintenue sur des tons aigus, permet aisément de les assimiler à une marqueterie en bois.
Sur les parois, les fresques sont disposées selon une mise en page simple linéaire sur deux registres – les scènes de l’Adieu aux Apôtres et de la Mort de Marie, avec le Christ soutenant son âme dans le registre supérieur ; dans la partie inférieure, les Funérailles de la Vierge et son Assomption. Le cycle de fresques, qui forment un ensemble unitaire, bien que très appauvri au fil du temps, est complété au plafond par des images d’anges, d’évangélistes, de docteurs de l’Église. Sur le mur du fond de la chapelle, dans les arcs au-dessus du maître-autel, se détachent les figures de l’Ange annonciateur et de la Vierge de l’Annonciation, au-dessus de celles des prophètes Isaïe et Jérémie dans des cadres ; sur les côtés apparaissent celles de Pierre et Paul, ainsi que deux anges adorateurs, fortement repeints.
L’ambiguïté terminologique et historiographique entre la Cappella dei Nove, située au rez-de-chaussée du Palazzo et pour laquelle Duccio avait exécuté en 1302 une Maestà dotée d’une prédelle, et la Cappella de’ Signori située à l’étage noble, qui à partir de 1406 remplaça la précédente, a créé quelque difficulté dans l’identification du retable qui se trouvait au-dessus de l’autel.
Cependant, il est documenté qu’en 1686 un tabernacle en marbre de Lorenzo di Mariano a été transféré de la cathédrale et placé contre le mur du fond, au centre duquel était placée la Sainte Famille avec saint Leonardo de Sodoma, et qu’en 1448 Sano di Pietro avait été chargé de restaurer le panneau de l’autel, en mauvais état de conservation, et de le compléter d’une prédelle avec des Épisodes de la vie de la Madone, aujourd’hui répartis dans divers musées. Sa contribution, parachevée par celle du charpentier Giovanni di Magno, a été complétée par quelques marches devant l’autel lui-même et par une voûte en bois au-dessus du retable, avec l’intention évidente de monumentaliser l’ensemble pour l’adapter aux exigences du temps : un projet qui semble signaler les dimensions réduites ou trop discrètes de l’œuvre préexistante.
Pour compliquer le problème, en 1372 le consistoire alloua 30 florins d’or pour un panneau destiné à la Cappella dei Nove, mais on ne sait si celui-ci devait remplacer celui de Simone Martini, qui en 1326 avait lui-même remplacé l’ancien exécuté par Duccio ; on ne sait donc pas si la prédelle commandée à Taddeo dès 1401 était destinée à ce dernier ou au précédent. Il est cependant probable que, avec un fort signe de continuité pas inhabituel à Sienne, l’ancien retable fut transféré dans la nouvelle structure au rez-de-chaussée, et que l’artiste avait articulé le projet iconographique complexe autour de lui.
Les critiques se sont interrogés sur l’identification du retable de Martini et l’ont raisonnablement identifié dans un polyptyque à cinq compartiments conservé au Metropolitan Museum de New York et à la Lederer Collection de Genève : ces compartiments représentent une Vierge à l’Enfant, Saint Pierre, un Apôtre (probablement André), Luc et Ansano, ce dernier brandissant la bannière noire et blanche de la municipalité de Sienne. 42 Privé la menuiserie d’origine, mais encore de petite taille, il pourrait facilement s’adapter à l’espace limité de la Cappella dei Nove située au rez-de-chaussée du Palais.
Cependant, il semble plus probable que le panneau de 1372, censé contenir un Couronnement de la Vierge, ait été placé sur l’autel du nouveau siège, puisque dans le document attribuant la nouvelle prédelle à Sano di Pietro, daté du 24 décembre 1448, il est recommandé que son cadre n’interfère pas avec le “pied du sauveur qui couronne notre dame”. 43 Et il est significatif que l’Annonciation dans les deux lunettes et cette dernière scène ( le Couronnement), immédiatement visible en arrière-plan même sans entrer dans la chapelle, aient constitué les épisodes initiaux et finaux de l’histoire de Marie, à qui depuis la bataille de Montaperti en 1260 la ville de Sienne avait prêté allégeance.
Selon toute vraisemblance, la soi-disant Pace en cuivre doré, argent et émaux translucides appartient au même auteur, et a toujours été conservée au Palazzo Pubblico, aujourd’hui le Musée Civique, où l’on voit le Christ dans une mandorle, flanqué par des anges sont reliés dans les angles les bustes des évangélistes accompagnés de leurs animaux symboliques respectifs, ainsi que les armoiries de la municipalité de Sienne et du capitaine du peuple, qui lui donnent une connotation clairement civique. Sa reconnaissance correcte comme couverture d’un évangéliaire l’identifie comme le seul reste des livres liturgique destinés aux offices célébrés dans la chapelle, tant dans l’ancienne que dans la nouvelle, compte tenu également de son attribution à un orfèvre siennois et sa probable exécution dans la décennie 1390-1400.45
Enfin, une fontaine en marbre pour l’eau bénite, ornée de trois anges en bronze doré, a été réalisée en 1434 par Giovanni di Turino, auteur, avec son père, des fonts baptismaux de l’église paroissiale de San Giovanni, également à Sienne, commandés à eux en 1417 ; toujours en 1438, l’artiste place une figurine du Christ bénissant sur le dessus du bénitier.46
La construction de la salle s’est terminée par la belle et sévère porte en fer forgé et étamé, commandée – peut-être d’après un dessin de Jacopo della Quercia – au forgeron Niccolò di Paolo en 1435, et achevée après sa mort par Giacomo di Vita avec son fils Giovanni, qui témoigne d’une rigueur géométrique disciplinée et composée, à peine violée dans la partie supérieure par une frise horizontale contenant les armoiries en noir et blanc de la municipalité de Sienne et la louve aux jumeaux, couronnées tour à tour par des lances, des paniers, des motifs végétaux. 47
Quant au cycle des Hommes Illustres, peint à fresque quelques années plus tard par Taddeo lui-même dans l’anté-chapelle, il faut souligner la proximité physique entre un thème religieux et un thème « politique », qui met en lumière un subtil réseau de références idéologiques confiées au production artistique.
Anna Rosa CALDERONI MASETTI, « Concerto d’arti », dans Max SEIDEL (dir.), Storia delle arti in Toscana. Il Trecento, Florence, Edifir – Cassa di Risparmio di Firenze, 2004, pp. 117-146.
Notes
1↑ | Cette chapelle primitive donnant directement sur le Campo existe toujours. Elle est encore en fonction. |
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2↑ | On ignore tout de la date et du lieu de naissance du peintre Giovanni di Pietro (actif à Sienne au milieu du Quattrocento). La thèse de C. B. Strehlke (Carl Brandon STREHLKE, dans La pittura senese nel Rinascimento, 1420-1500 (cat. d’exp., New York), Cinisello Balsamo, 1989, p. 278.) selon laquelle Giovanni di Pietro doit être identifié à un peintre documenté comme collaborateur de Matteo di Giovanni dans les années 1450, de même que tous les peintres appelés “Nanni di Pietro” actifs à Sienne à la même période, est depuis longtemps accréditée : en particulier, avec le “Nanni di Pietro da Pienza depentore” mentionné par Romagnoli (Ettore ROMAGNOLI, Biografia cronologica de’ bellartisti senesi 1200-1800, Sienne, 1835, IV, , pp. 205-210), et, depuis Milanesi (Gaetano MILANESI, Documenti per la storia dell’arte senese, II, Sienne, 1856, p. 288), avec l’homonyme, également peintre, frère de Lorenzo di Pietro, dit ‘Vechietta’. Si, sur la base des données existantes, il est impossible de vérifier cette identification, la reconstitution d’un artiste né dans la région siennoise, peut-être à Pienza (Romagnoli, IV, p. 205) ou à Sienne même (Hartlaub, p. 59), frère de Vecchietta, actif entre 1439 et 1463, mais documenté jusqu’en 1479. |
3↑ | Mattìa di Nanni, dit ‘il Bernacchino’ (Sienne 1403 – v. 1433) : sculpteur et marqueteur. Outre sa collaboration avec Domenico di Niccolò sur le chantier des stalles de la chapelle des Seigneurs, on le connait à travers son activité de décorateur à l’intérieur du Palazzo Pubblico pour lequel il exécuta cinq « tondi » avec des figures d’hommes illustres (perdus) et deux scènes allégoriques dont l’une comporte une vue de la ville. |
4↑ | 37 |
5↑ | Anna Rosa CALDERONI MASETTI, « Concerto d’arti », dans Max SEIDEL (dir.), Storia delle arti in Toscana. Il Trecento, Florence, Edifir – Cassa di Risparmio di Firenze, 2004, pp. 117-146. L’idée demeura sans suite, mais on ne peut ignorer la diffusion de cette prière dans la sphère figurative, attestée par de nombreux exemples, en Italie comme en France, par des œuvres de nature différente, peintures, sculptures, orfèvrerie, miniatures, tapisseries. Voir Credo de La Chapelle de Jean de Bourbon à Cluny. |
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