Sano di Pietro, “Polittico dei Gesuati”

Sano di Pietro (Sienne, 1405 – 1481)

Polittico dei Gesuati ou Polittico del Beato Colombini (Polytyque des Jésuates ou Polyptyque du Bienheureux Colombini), 1444 (daté et signé).

Tempéra et or sur panneau, 320 x 282 cm., avec les encadrement en partie originaux (sans la prédelle, voir ci-dessous).

Inscriptions :

  • (au centre du cadre, en bas) : “OPUS SANI PETRI DE SENIS MCCCCLXIIII” [1]

Provenance : Couvent des Gesuati di San Girolamo, Sienne.

Sienne, Pinacoteca Nazionale.

Il s’agit de la première œuvre certaine de Sano di Pietro, incontestable du fait qu’elle est datée et signée par l’artiste siennois. C’est aussi, de l’avis unanime, l’un de ses plus grands chefs-d’œuvre. “En fait, jamais plus Sano n’atteint la splendide qualité de cette grande peinture où les couleurs possèdent une limpidité d’émail et le dessin une élégance d’un raffinement extrême, sans jamais faillir en affaiblissant les rythmes, créant, au contraire, de très nobles images qui atteignent leur sommet dans la figure solennelle de saint Jérôme. (fig. 2) C’est encore la lumière claire qui se respire (sic) dans les œuvres de Sassetta et du Maître de l’Observance. Il semble vraiment impossible que Sano, sans avoir rien créé auparavant, soit parvenu, comme à l’improviste, et à 38 ans de surcroît, à ce fulgurant chef-d’œuvre et immédiatement ensuite, ait commencé un lent déclin dans les centaines d’œuvres dont sont inondées les musées du monde entier, le rendant ainsi presque trop célèbre. C’est sur ce constat que Brandi pose une de ses pierres fondamentales pour démontrer l’unité qui existe entre le Maître de l’Observance et l’auteur du Polyptyque des Jésuates. Il est certain qu’il est ici beaucoup plus proche du Retable de l’Observance ou de la Nativité d’Asciano que de sa dernière œuvre, la Pietà e Santi aujourd’hui conservée au Monte dei Paschi, à Sienne, datée 1481 et signée, où l’artiste est digne d’être comparé à quelque chose d’à peine mieux qu’un peintre de goût populaire.” [2]

Panneau central

Sur le panneau central est représentée La Madonna col Bambino e sei angeli, adorata dal Beato Colombini genuflesso ai Suoi piedi (La Vierge à l’Enfant et six anges, adorée par le Bienheureux Colombini agenouillé à Ses pieds).

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1

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2

Compartiments latéraux

Y figurent,

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3                                              4

  • à droite, les saints (fig. 4) :
    • Augustin (fig. 5, détail). À lui seul, ce détail est tout à la fois un spendide poème en peinture et un délicat hommage à une longue tradition siennoise, et sans doute italienne, mais c’est à Sienne qu’elle relève du merveilleux. Entendons-nous. Dans le manteau du saint, dont la somptuosité est au-delà des mots,  se multiplient les illusions et se noient entre les plis, dans une véritable mise en abîme, les figures d’autres saints, eux aussi porteurs des phylactères avec lesquels ils s’auto-désignent aux regards du spectateur. Comme s’ils étaient désireux de ne pas sombrer entièrement, ils viennent perpétuer le long discours muet des saints qui, à Sienne, sur les façades de la cathédrale comme entre les pages des choraux, semblent hurler leur nom à force de l’exhiber au regard afin de se faire un peu entendre.
    • François

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5

Pilastres latéraux

Dans les pilastres latéraux, créant deux à deux des échos ou des symétries, se prolonge, comme toujours dans les polyptyques gothiques, la foule des saints :

Dans les cuspides,

  • au centre (fig. 7) :
    • le Rédempteur 
  • à gauche (fig. 6) :
    • Côme
    • Ange de l’Annonciation
  • à droite (fig. 8) :
    • Vierge de l’Annonciation
    • Damien

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Prédelle

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Le polyptyque est aujourd’hui privé de sa prédelle. L’incomparable ensemble des compartiments provenant de cette prédelle représente cinq scènes de la vie de saint Jérôme, d’un charme absolu. La prédelle complète est conservée au Louvre depuis le rachat par la France, en 1861, de l’essentiel de la Collection Campana.

[1] “Œuvre de Sano di Pietro, de Sienne, 1444”.

[2] TORRITI 1977, p. 256.