Niccolò di ser Sozzo (Sienne, actif à partir de 1350 [1]Son nom est cité pour la première fois en 1348, dans un document officiel de la ville de Sienne. – 1363)
La Vergine Assunta fra angeli e santi (La Vierge de l’Assomption parmi des anges et des saints), milieu du XIVe s. [2]La miniature est unanimement placée par la critique à la fin de la quatrième décennie du XIVe siècle, compte tenu du fait que le texte a été achevé au cours de l’année 1336.
Frontispice enluminé du Caleffo Bianco dell’Assunta, miniature à la détrempe (tempéra) sur parchemin [3]Après la restauration de 2007-2008, la page décorée, contenue dans le premier fascicule séparé depuis l’origine du manuscrit, a été détachée et montée avec de fausses marges à l’intérieur d’un passe-partout en carton., 44 x 29 cm.
Inscriptions :
- (dans la bande dorée, sous la miniature) : « Salva Virgo Senam Veterem quam Noscis Amenam » [4]« Que la Vierge protège l’antique Sienne qu’elle-même sait belle. » L’invocation, que l’on peut également lire sous une forme très proche dans un détail très visible de la Maestà de Simone Martini (la reproduction du sceau de la Commune de Sienne réalisé par Guccio di Mannaia en 1298) révèle une nouvelle fois la dévotion en même temps que la … Poursuivre
- (en bas à droite) : « Nicholaus ser Sozzi de Senis me pinxit » [5]« Niccolò di ser Sozzo de Sienne m’a peinte » (signature du peintre).
- (sous la miniature, début du texte du caleffo) : « IN NOMINE SANCTE et individue Trinitatis, et gloriose semper Virginis Marie, cui potissime senensis civitas recommendata existit, et omnium sanctorum et sanctarum Dei, amen.
Quoniam decursio et varietas humane nature, ob culpam primorum parentum, subiecta defectibus, et curatione multiplici egens, non aliter ad bene… » [6]« Au nom de la sainte et indivise Trinité, et de la toujours glorieuse Vierge Marie, à qui la ville de Sienne est la plus puissamment recommandée, et de tous les saints et saintes de Dieu, amen. Parce que le cours et la variété de la nature humaine, dus à la faute des premiers parents, sont sujets à des défauts et nécessitent de multiples traitements, il n’y a pas … Poursuivre
Sienne, Archivio di Stato, Palazzo Piccolomini.

Le ’caleffo’ bianco (ou dell’Assunta) est l’un des cinq caleffi (cartulaires) conservés aux Archives d’État de Sienne. Il est appelé « blanc » en raison de la couleur du cuir qui recouvrait autrefois sa couverture, tandis que son nom (de l’ « Assomption ») provient de la miniature enluminée, placée sur le frontispice d’un fascicule ajouté afin de pouvoir poursuivre le travail dans un manuscrit initial déjà rempli. La critique est aujourd’hui unanimement d’accord pour situer la date d’exécution de la miniature vers la fin de la quatrième décennie du XIVe siècle, à une époque située peu après l’achèvement du caleffo [7]Celui-ci contient la transcription de privilèges impériaux, de bulles papales, de pactes conclus avec les familles et avec la ville de 813 à 1336. Sur le Caleffo bianco, voir « Del Caleffo dell’Assunta », dans Archivio storico Italiano, Florence, Deputazione di storia patria per la Toscana, 1866, Volume 17, p. 61, mise en ligne : … Poursuivre.
Considérée par Cesare Brandi (1932) comme la plus belle produite par l’art siennois au cours de la première moitié du XIVe siècle, la miniature est l’œuvre de Niccolò di ser Sozzo qui l’a signée en lettres d’or sur la partie du sol représentée en bas à droite [8]Voir note 4.. Elle représente l’Assomption de la Vierge : celle-ci monte au ciel vêtue d’un manteau d’un blanc immaculé, les mains jointes en prière, et assise presque frontalement dans une mandorle entourée de vingt-quatre anges en vol parmi lesquels douze sont en oraison, quatre sont musiciens et huit autres soutiennent la mandorle sans laquelle le miracle n’aurait pu avoir lieu. Au-dessous, Thomas, à genoux, tend les bras en avant et s’apprête à recueillir la ceinture que, selon le récit légendaire, la Vierge laisse tomber vers lui afin comme signe tangible de son enlèvement. Cette ceinture, partiellement visible encore sur le sol de marbre et sur les mains du saint, n’est plus qu’une ombre de couleur rouge-orangé sur le fond d’or sur lequel elle a été peinte [9]Appliqué à même le fond d’or insuffisamment adhérent, le pigment coloré s’est délité avant de tomber.
Comme dans la plupart des peintures siennoises ayant l’Assomption pour sujet [10]Voir, par exemple l’Assomption de Bartolomeo Bulgarini, Sienne, Pinacoteca Nazionale, inv. 61., Marie ne se tourne pas vers Thomas et ne lui confie pas directement la ceinture : celle-ci paraît tomber du ciel. La diffusion de ce motif iconographique, indépendamment de la présence à Sienne de la relique de la Ceinture, arrivée à l’hôpital de Santa Maria della Scala seulement en 1359, trouve son origine dans la plus ancienne tradition textuelle de l’épisode (Pseudo Joseph d’Arimathie ; Jacques de Voragine), tandis que l’épisode de la remise de la ceinture en mains propres à l’apôtre n’est effective que dans les œuvres produites dans les sphères d’influence de Prato et de Florence.
Dans le cadre aux motifs géométriques sont représentés, aux angles, les saints patrons de la ville, Crescenzio, Savino et Vittore. Ansano, quant à lui, est figuré en pied, portant la Balzana et la palme du martyre, dans l’initiale I du texte [11]Voir note 5., à l’angle inférieur gauche de l’image. Le format rectangulaire du cadre peint est entouré d’un riche décor fait de motifs géométriques, de pousses végétales stylisées et de drôleries, le tout peint avec le raffinement extrême, typique des miniatures gothiques, et un chromatisme intense fondé sur des couleurs vives au ton émaillé. La référence à la ville de Sienne revient une nouvelle fois dans la partie inférieure de la page où se trouvent trois blasons : au centre la Balzana, symbole de la Municipalité, flanqué de deux blasons du Peuple.
« Les rythmes ondulants des plis, la gamme chromatique ravivée par des éclats d’or font de cette miniature justement célèbre l’une des plus hautes expressions du gothique à Sienne. L’ “élan passionné de saint Thomas” (Toesca, 1951), qui assume en frémissant une vérité spatiale […] en partie atteinte, les figures des anges en vol, en particulier les extraordinaires musiciens du premier registre, tout contribue à évoquer le nom de Simone Martini à qui, évidemment, Niccolò di Ser Sozzo a eu recours pour représenter cette image extrêmement élégante et délicieusement gothique. Cependant, la Vierge, vue dans une position qui n’est pas entièrement frontale mais légèrement décalée vers la droite, semble être un emprunt ponctuel au polyptyque de l’Assomption daté de 1320 de la Pieve d’Arezzo, de Pietro Lorenzetti […]. » [12]Giulietta Chelazzi Dini, « Caleffo Bianco o dell’Assunta », dans Il Gotico a Siena. Miniature, pitture, oreficerie, oggetti d’arte (cat. exp. Sienne 1982), Florence, Centro Di, 1982 p. 237 et dans TOMEI, A., Le Biccherne di Siena. Arte e finanza all’alba dell’economia moderna, catalogo della mostra (Roma-Palazzo del Quirinale 1 marzo 2002-13 aprile 2002, Washington-The Corcoran … Poursuivre
Notes
1↑ | Son nom est cité pour la première fois en 1348, dans un document officiel de la ville de Sienne. |
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2↑ | La miniature est unanimement placée par la critique à la fin de la quatrième décennie du XIVe siècle, compte tenu du fait que le texte a été achevé au cours de l’année 1336. |
3↑ | Après la restauration de 2007-2008, la page décorée, contenue dans le premier fascicule séparé depuis l’origine du manuscrit, a été détachée et montée avec de fausses marges à l’intérieur d’un passe-partout en carton. |
4↑ | « Que la Vierge protège l’antique Sienne qu’elle-même sait belle. » L’invocation, que l’on peut également lire sous une forme très proche dans un détail très visible de la Maestà de Simone Martini (la reproduction du sceau de la Commune de Sienne réalisé par Guccio di Mannaia en 1298) révèle une nouvelle fois la dévotion en même temps que la soumission du gouvernement de Sienne à la Vierge. Symbole de civitas et de fierté citoyenne, l’image de l’Assomption rend hommage aux œuvres peintes sur le même sujet par les plus grands maîtres de la peinture siennoise qui l’ont précédé : Duccio di Buoninsegna et Simone Martini. Le premier avait représenté la Vierge de l’Assomption enfermée frontalement dans une mandorle, les mains jointes en prière, dans le vitrail destiné à l’oculus de la cathédrale ; le second était l’auteur d’une fresque datant du début des années 1330, représentant l’Assomption (Antiporto de Camollia, aujourd’hui perdue), copiée par Lippo Memmi en 1340 (Himmelfahrt Mariae, Munich, Alte Pinakothek) et qui, pour des raisons à la fois esthétiques, dévotionnelles et civiques, se distinguera comme un modèle incomparable pour les peintres siennois des XIVe et XVe siècles. |
5↑ | « Niccolò di ser Sozzo de Sienne m’a peinte » (signature du peintre). |
6↑ | « Au nom de la sainte et indivise Trinité, et de la toujours glorieuse Vierge Marie, à qui la ville de Sienne est la plus puissamment recommandée, et de tous les saints et saintes de Dieu, amen. Parce que le cours et la variété de la nature humaine, dus à la faute des premiers parents, sont sujets à des défauts et nécessitent de multiples traitements, il n’y a pas d’autre voie pour le bien… » Le texte se poursuit sur la page suivante. Voir note 7. |
7↑ | Celui-ci contient la transcription de privilèges impériaux, de bulles papales, de pactes conclus avec les familles et avec la ville de 813 à 1336. Sur le Caleffo bianco, voir « Del Caleffo dell’Assunta », dans Archivio storico Italiano, Florence, Deputazione di storia patria per la Toscana, 1866, Volume 17, p. 61, mise en ligne : https://books.google.it/books?id=ffRUAAAAcAAJ&pg=PA61&lpg=PA61&dq=Salva+Virgo+Senam+Veterem+quam+Noscis+Amenam&source=bl&ots=wMgKz5vcbf&sig=ACfU3U1hMvBZGQhTp5YideuuvLISWjnNPQ&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwiL17j8ofD_AhVYgP0HHYcpAt4Q6AF6BAgTEAI#v=onepage&q=Salva%20Virgo%20Senam%20Veterem%20quam%20Noscis%20Amenam&f=false |
8↑ | Voir note 4. |
9↑ | Appliqué à même le fond d’or insuffisamment adhérent, le pigment coloré s’est délité avant de tomber. |
10↑ | Voir, par exemple l’Assomption de Bartolomeo Bulgarini, Sienne, Pinacoteca Nazionale, inv. 61. |
11↑ | Voir note 5. |
12↑ | Giulietta Chelazzi Dini, « Caleffo Bianco o dell’Assunta », dans Il Gotico a Siena. Miniature, pitture, oreficerie, oggetti d’arte (cat. exp. Sienne 1982), Florence, Centro Di, 1982 p. 237 et dans TOMEI, A., Le Biccherne di Siena. Arte e finanza all’alba dell’economia moderna, catalogo della mostra (Roma-Palazzo del Quirinale 1 marzo 2002-13 aprile 2002, Washington-The Corcoran Gallery of Art, 1 agosto 2002-14 ottobre 2002, Siena-Complesso Museale Santa Maria della Scala, 7 dicembre 2002-1 giugno 2003). Roma, EUROGRAFICA printing, 2002. |