‘Maestro di Tressa’,  « Il Redentore benedicente »

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 ‘Maestro di Tressa ‘ (actif à Sienne entre 1215 et 1240) 

Il Redentore benedicente ou Paliotto del Salvatore (Le Rédempteur bénissant ou Devant d’autel du Sauveur)1215 (daté).

Tempéra sur bois, 98 x 198 cm.

Inscriptions :

  • (à gauche de la figure centrale) : « IHS »
  • (en haut, sous le cadre) : « ANNO D[OMI]NI MILLESIMO CCXV MENSE NOVENBRI HEC TABULA FACTA EST » [1]« Ce panneau a été fait en l’an 1215, au mois de novembre. »
  • D’autres inscriptions sont visibles mais illisibles dans la scène du Crucifix outragé par les Juifs :
    • (à côté du Crucifix) : « HIC EST [REX IUDEOTUM] » [2]Fragmentaire, cette inscription, présente dans la seconde scène à gauche, a été rapportée par Cesare Brandi (BRANDI, 1933, p. 20).
    • (au-dessus du Crucifix) : « HIC EST DEI EXCOLENDA PASSIONE … » [3]« Ceci est la Passion vénérée de Dieu. »

Provenance : Église de San Salvatore e Alessandro, Fontebuona della Badia Bardenga (Castelnuovo Berardenga), près de Sienne.

Sienne, Pinacoteca Nazionale. Inv. n. 1.

Les critères du jugement esthétique, on le sait, varient avec une versatilité qui doit beaucoup à l’époque et au goût du moment où celui-ci est prononcé. C’est ainsi que la critique d’art Lucy Olcott, au tout début du XXe s., qualifiait le panneau de « good example of the crude Italian work of the early 13th century » [4]« Un bon exemple du travail italien brut du début du XIIIe siècle. » HEYWOOD, William, OLCOTT, Lucy, Guide to Siena, History and Art. Sienne, Enrico Torrini Publisher, 1903, p. 319., tandis qu’Adolfo Venturi, qui fut le premier à l’identifier en tant que paliotto le juge « di rozzezza estrema, miseramente imitato da un’opera bizantina di metallo, come si puo riconoscere dagli ornati degli scompartimenti con crocette entro rombi » [5]« […] d’une extrême rudesse, lamentablement imité d’un travail byzantin du métal, ainsi que l’on peut le constater à travers les ornements des compartiments avec des croix dans des losanges. » A. Venturi, La pittura del Trecento e le sue origini, dans Storia dell’arte italiana, V, Milan, Hoepli, 1907, pp. 80-82.. Aujourd’hui pourtant, sa beauté à la fois simple et touchante, de même que la sincérité ingénue (ou primitive) des images peintes répondant à l’étonnante complexité de son programme iconographique en font une œuvre qui évoque avec une éloquence rare un univers révolu dans lequel légende et féérie se mêlaient aussi pour améliorer la perception d’un quotidien plein d’incertitudes et de dangers.

Le Paliotto del Salvatore est documenté comme étant l’œuvre la plus ancienne de l’École siennoise : il s’agit d’un antependium, élément décoratif réalisé le plus souvent en bois dans un souci d’économie, de format rectangulaire, précieusement ouvragé et placé à l’avant de l’autel. C’est d’ailleurs cet emplacement particulier qui lui vaut son appellation latine (antependium : qui pend à l’avant). On appelle aussi pareille pièce de mobilier devant d’autel (les italiens utilisent, quant à eux, le terme paliotto). On en rencontre des exemples dans plusieurs pays, aussi bien au nord qu’au sud de l’Europe. Ceux qui sont peints figurent parmi les plus anciens panneaux ornés qui soient parvenus jusqu’à nous.

Il s’agit également du premier ouvrage connu du pseudo ‘Maître de Tressa’, actif entre la seconde décennie et le milieu du XIIIe siècle, dont le nom conventionnel dérive de la Vierge à l’Enfant avec panneaux latéraux historiés de l’église de Santa Maria à Tressa. Le style de l’antependium est encore marqué par la culture « néocopte » qui caractérise de nombreuses œuvres picturales de l’ouest de la Toscane peintes entre le XIIe et le XIIIe siècle, souvent avec l’introduction de la technique a pastiglia [6]On appelle pastiglia (fr. : « pastille ») une décoration en bas-relief, modelée dans le gesso (plâtre) ou le blanc de plomb, formant un support qui peut ensuite, le cas échéant, être doré ou peint..

Attribué à l’hypothétique ‘Maître de Tressa‘, cet antependium est réalisé dans un bois d’épaisseur relativement importante, de format oblong (longueur = hauteur x 2). Dans la partie centrale de celui-ci, se trouve un bas-relief polychrome inscrit dans un carré. Il représente, davantage que Le Christ Rédempteur bénissant entre deux anges, la Majestas Domini, selon une iconographie inspirée de celle du Pantocrator byzantin [7]Voir Salvatore Barbagallo, « Iconografia liturgica del Pantokrator », dans Studia Anselmiana, 122, Analecta Liturgica, 22, Rome, Pontificio Ateneo S. Anselmo, 1996.. « Le Christ est figuré assis sur un arc orné d’étoiles qui symbolise le monde, à l’intérieur d’une mandorle, elle-même métaphore de sa nature divine, dont les contours sont également ornés d’étoiles venues signifier ici le firmament. Il porte un sticharion [8]Le sticharion est porté sous deux formes par les ministres du culte dans le rite byzantin : l’une pour les prêtres, l’autre pour les diacres, sous-diacres et servants d’autel. Vêtement droit, long, et, pour ces derniers, dotés de larges manches, il correspond à peu près à l’aube portée dans l’Église latine. de couleur pourpre – la couleur de la robe des empereurs – qui symbolise sa seigneurie sur le monde ainsi que l’affirmation de sa divinité. Le sticharion est couvert d’une toge bleue, symbole de son humanité assumée avec l’Incarnation, qui l’enveloppe en se resserrant autour du bras gauche et en laissant le bras droit découvert. Barbu, coiffé d’une chevelure en forme de casque qui descend derrière les épaules, il porte une auréole. De la main gauche, il tient le Livre des Saintes Écritures fermé et appuyé sur le genou gauche, tandis que de la main droite, il exécute un geste de bénédiction en tenant l’index et le majeur tendus, l’annulaire et l’auriculaire repliés vers le pouce. Le Christ est flanqué de deux anges. Celui de droite est vêtu d’une tunique rouge et d’une dalmatique bleue, celui de gauche, inversement, porte une tunique bleue et une dalmatique rouge. Les mains de chacun des deux anges sont couvertes d’un voile blanc en signe de respect, selon la coutume orientale. Selon toute vraisemblance, il s’agit des deux archanges-diacres Michel (à droite) et Gabriel (à gauche), comme on les rencontre souvent dans les peintures de la même époque et d’époques antérieures. » [9]Raffaele Argenziano, Agli inizi dell’iconografia sacra a Siena: culti, riti e iconografia a Siena nel XII secolo, Florence, Sismel (Coll. Millennio medievale), 2000. Aux quatre angles du compartiment central est représenté le tétramorphe dont la source se trouve notamment dans l’Apocalypse de Jean l’Évangéliste, elle-même inspirée du Livre d’Ézéchiel [10]Ez 1, 9-11.. De chaque côté du Christ apparaissent deux fragments d’écriture. A droite on reconnaît le trigramme IHS (Jésus), tandis qu’à gauche, on ne devine plus, à l’heure actuelle, qu’un S ou, plus vraisemblablement, un C qui devait être accompagné d’un X pour former le monogramme XC ou XPS (Christus).

À l’origine, les yeux grands ouverts du Rédempteur étaient peints, comme l’attestent les quelques traces de couleur qui subsistent, et devaient asséner un regard sans complaisance sur le spectateur, à l’instar de l’image de la Vierge aux gros yeux du même ‘Maître de Tressa’, conservée au Museo dell’Opera del Duomo à Sienne.

De chaque côté de la scène centrale où figure la Maiestas Domini, sont représentées six scènes aujourd’hui difficilement déchiffrables, respectivement trois scènes à gauche et trois à droite. Le sujet de chacune d’elles a été déchiffré récemment : trois d’entre elles, situées à gauche, évoquent la légende du Crucifix de Beyrouth, deux autres, à droite, rappellent des épisodes de la légende de l’Invention de la Vraie Croix, la sixième relate le martyre des saints Alexandre et Évence. Ces différentes scènes narratives étaient liées aux principales célébrations liturgiques dont les églises [11]L’église de San Salvatore e Alessandro, à Fontebuona, d’où provient ce splendide ornement d’autel était l’une d’elles. dédiées au Sauveur perpétuaient le culte : les épisodes relatifs au Crucifix de Beyrouth sont liées à la fête de la Passio Imaginis célébrée le 9 novembre, la fête de l’Invention de la Croix le 3 mai et, le même jour, celle des saints Alexandre (souvent confondu avec le saint pape Alexandre 1er) et Évence.

Datant du IVe s., le texte intitulé De passione imaginis [12]Athanasii Archiepiscopi Alexandrini, De passione imaginis Domini Nostri Jesu Christi, qualiter crucifixa est in Beryto, Syriae civitate libellus. Le récit de la Passio imaginis a été édité au XVIe s. dans J. D. Mansi, Sacrorum conciliorum nova et amplissima collectio (vol. XIII), Florence-Venise, 1559 puis 1598, col. 24-32 ; repris, au XIXe s. dans Jacques-Paul Migne, Patrologiae Cursus … Poursuivre, attribué à saint Athanase, archevêque d’Alexandrie (295-373), constitue le récit de l’icône du Christ profanée dans la ville de Beyrouth [13]Le récit, « dérivé d’une série de traditions orientales et exploité en particulier par les savants iconodoules comme argument en faveur du culte des images, se caractérise par une narration hagiographique dans laquelle, au lieu d’une personne physique, c’est un objet figuratif qui joue le rôle de protagoniste ». (Michele Bacci, « Le Majestats, il Volto Santo e il Cristo di … Poursuivre. Plus précisément, ce récit, parvenu en Europe de l’Ouest à l’époque du Second Concile de Nicée [14]Septième concile œcuménique, le concile de Nicée (787) est le dernier de ceux que les Grecs et les Latins s’accordent à classer parmi les conciles généraux. Les Actes de cette assemblée, amplement rédigés, forment un volume entier de l’édition de Mansi. Anastasius le Bibliothécaire en a fait une traduction latine, qui n’est pas toujours conforme aux textes grecs qui … Poursuivre, au cours duquel il fit l’objet d’une lecture en séance [15]Le texte a d’abord été lu pendant le Concile de Nicée II, attribué à saint Athanase, archevêque d’Alexandrie, puis inclus dans la traduction en latin des Actes de ce Concile par le bibliothécaire Anastasius. (Voir Raffaele Argenziano, Agli inizi dell’iconografia sacra a Siena: culti, riti e iconografia a Siena nel XII secolo, op. cit, p. 161)., met en scène une communauté d’Hébreux supposée réitérer volontairement la Passion du Christ à travers les outrages qu’ils commettent sur une croix peinte [16]C’est cette icône, image peinte du Christ en Croix évoquant la Passion, qui donne son nom à l’épisode légendaire. La Passio imaginis est considérée comme une sorte de seconde Passion infligée au Christ à travers son image.. L’épisode aurait eu lieu à Beyrouth [17]« Il y a une certaine ville en Syrie, située aux confins de Tyr et de Sidon, appelée Beyrouth, et soumise à Antioche. Dans cette ville, il y avait une multitude innombrable d’Hébreux, si bien qu’en ces temps la ville tenait le rang de métropolitaine. Il arriva qu’un chrétien obtint un logement proche de la synagogue des Hébreux, qui passait pour très importante, de la … Poursuivre : lors d’un repas en ville chez un particulier, un Juif vient à remarquer chez son hôte la présence d’un crucifix accroché à un mur (l’objet a été oublié par mégarde par le précédent occupant des lieux). Décidant de répéter par dérision l’acte de la Crucifixion, un groupe alerté par le convive décide de profaner l’image du Christ en croix. Face aux outrages, l’image réagit miraculeusement, et le sang mélangé à de l’eau sorti du côté droit de la figure peinte, comme s’il s’agissait d’un véritable corps humain, permet de guérir des malades. Après cet événement extraordinaire, tous les Hébreux impliqués dans cette vilaine affaire, mais « parvenus à la connaissance de la vérité » (« ad agnitionem veritatis venire ») selon « le conseil secret du Seigneur, qui veut que tous les hommes soient sauvés » (« […] Domini occulto peractum est consilio, qui vult omnes homines salvos fieri »), auraient décidé de se convertir. Le récit légendaire a été répandu en Occident grâce à la traduction latine des Actes de Nicée par Anastasius le Bibliothécaire vers 872.

La seconde légende, celle de l’Invention de la Vraie Croix par sainte Hélène est rapportée dans deux des trois panneaux de droite, tandis que le dernier, en bas à droite, est consacré au martyre des saints Alexandre et Évence.

Le devant d’autel, exécuté en 1215, date de la période où les moines Camaldules propriétaires de l’abbaye de San Salvatore étaient engagés dans un conflit visant à leur garantir davantage d’autonomie vis-à-vis de l’évêque d’Arezzo et de la puissante famille des Berardenghi. Dans ce contexte, il est concevable, selon Michele Bacci [18]Michele Bacci, “The Berardenga Antependium and the Passio Ymaginis Office”, Journal of the Warburg and Courtauld Institutes, Vol. 61, 1998, p. 15., que l’œuvre ait été commandée pour le maître-autel de l’église comme une sorte de dédicace dans laquelle la référence au saint Patron était introduite afin de contrebalancer les anciennes traditions de l’abbaye. Néanmoins, le programme iconographique – le Sauveur au centre, les deux cycles de la Légende de Beyrouth et de celle de l’Invention de la Vraie Croix, ainsi que le martyre de saint Alexandre En l’an 1003, l’église abbatiale avait, pour la seconde fois, été solennellement dédiée au Sauveur et à saint Alexandre, tous deux commémorés comme saints Patrons depuis 881.)) – constitue une allusion à un seul et même rite liturgique : le Miracle de Beyrouth et l’Invention de la Croix étaient liés par leur utilisation commune au cours des fêtes consacrées au Sauveur ; quant à l’introduction de la scène consacrée à saint Alexandre, elle est due à la fois à la double dédicace de l’église [19]En l’an 1003, l’église abbatiale avait, pour la seconde fois, été solennellement dédiée à la fois au Sauveur et à saint Alexandre, tous deux commémorés comme saints Patrons des lieux depuis 881. et à la commémoration du martyre du saint pape qui tombait le 3 mai, date, également, de l’Invention de la Croix par sainte Hélène.

Contrairement à la verticalité des retables plus tardifs [20]Voir, par exemple, les retables franciscains tels le San Francesco e storie della sua vita peint par Guido di Graziano (Pinacothèque nationale de Sienne). où les scènes latérales étaient essentiellement consacrées à la célébration des actes et des miracles accomplis par saint représenté dans la partie centrale, « le but ultime des premiers antependia était plutôt de jouer un rôle lors de la célébration des offices solennels, en fournissant des pendants picturaux appropriés aux lectures liturgiques » faites à cette occasion. [21]Michele Bacci, « The Berardenga Antependium and the Passio Ymaginis Office », op. cit., p. 16.

[22]Barbara Baert, « The Retable of the Master of Tressa (Siena I215). Iconography and Function », Pantheon, Internationales Jahresbuch für Kunst, LVIl, Munich, 1999, pp. I4-21.

Notes

Notes
1 « Ce panneau a été fait en l’an 1215, au mois de novembre. »
2 Fragmentaire, cette inscription, présente dans la seconde scène à gauche, a été rapportée par Cesare Brandi (BRANDI, 1933, p. 20).
3 « Ceci est la Passion vénérée de Dieu. »
4 « Un bon exemple du travail italien brut du début du XIIIe siècle. » HEYWOOD, William, OLCOTT, Lucy, Guide to Siena, History and Art. Sienne, Enrico Torrini Publisher, 1903, p. 319.
5 « […] d’une extrême rudesse, lamentablement imité d’un travail byzantin du métal, ainsi que l’on peut le constater à travers les ornements des compartiments avec des croix dans des losanges. » A. Venturi, La pittura del Trecento e le sue origini, dans Storia dell’arte italiana, V, Milan, Hoepli, 1907, pp. 80-82.
6 On appelle pastiglia (fr. : « pastille ») une décoration en bas-relief, modelée dans le gesso (plâtre) ou le blanc de plomb, formant un support qui peut ensuite, le cas échéant, être doré ou peint.
7 Voir Salvatore Barbagallo, « Iconografia liturgica del Pantokrator », dans Studia Anselmiana, 122, Analecta Liturgica, 22, Rome, Pontificio Ateneo S. Anselmo, 1996.
8 Le sticharion est porté sous deux formes par les ministres du culte dans le rite byzantin : l’une pour les prêtres, l’autre pour les diacres, sous-diacres et servants d’autel. Vêtement droit, long, et, pour ces derniers, dotés de larges manches, il correspond à peu près à l’aube portée dans l’Église latine.
9 Raffaele Argenziano, Agli inizi dell’iconografia sacra a Siena: culti, riti e iconografia a Siena nel XII secolo, Florence, Sismel (Coll. Millennio medievale), 2000.
10 Ez 1, 9-11.
11 L’église de San Salvatore e Alessandro, à Fontebuona, d’où provient ce splendide ornement d’autel était l’une d’elles.
12 Athanasii Archiepiscopi Alexandrini, De passione imaginis Domini Nostri Jesu Christi, qualiter crucifixa est in Beryto, Syriae civitate libellus. Le récit de la Passio imaginis a été édité au XVIe s. dans J. D. Mansi, Sacrorum conciliorum nova et amplissima collectio (vol. XIII), Florence-Venise, 1559 puis 1598, col. 24-32 ; repris, au XIXe s. dans Jacques-Paul Migne, Patrologiae Cursus Completus, Series Graeca (ou Patrologiae cursus completus, seu bibliotheca universalis, integra, uniformis, commoda, oeconomica omnium s.s patrum, doctorum scriptorumque ecclesiasticorum sive latinorum, sive graecorum qui ab aevo apostolico ad aetatem Innocentii III [ann. 1216] pro occidentalibus, et ad Photii tempora [ann. 863] pro orientalibus. Series graeca et orientalis), vol. 28, Paris, J.-P. Migne, 1839, col. 813-819.
13 Le récit, « dérivé d’une série de traditions orientales et exploité en particulier par les savants iconodoules comme argument en faveur du culte des images, se caractérise par une narration hagiographique dans laquelle, au lieu d’une personne physique, c’est un objet figuratif qui joue le rôle de protagoniste ». (Michele Bacci, « Le Majestats, il Volto Santo e il Cristo di Beirut: nuove riflessioni », dans Iconographica 13, 2014, pp. 45-66).
14 Septième concile œcuménique, le concile de Nicée (787) est le dernier de ceux que les Grecs et les Latins s’accordent à classer parmi les conciles généraux. Les Actes de cette assemblée, amplement rédigés, forment un volume entier de l’édition de Mansi. Anastasius le Bibliothécaire en a fait une traduction latine, qui n’est pas toujours conforme aux textes grecs qui nous sont parvenus.
15 Le texte a d’abord été lu pendant le Concile de Nicée II, attribué à saint Athanase, archevêque d’Alexandrie, puis inclus dans la traduction en latin des Actes de ce Concile par le bibliothécaire Anastasius. (Voir Raffaele Argenziano, Agli inizi dell’iconografia sacra a Siena: culti, riti e iconografia a Siena nel XII secolo, op. cit, p. 161).
16 C’est cette icône, image peinte du Christ en Croix évoquant la Passion, qui donne son nom à l’épisode légendaire. La Passio imaginis est considérée comme une sorte de seconde Passion infligée au Christ à travers son image.
17 « Il y a une certaine ville en Syrie, située aux confins de Tyr et de Sidon, appelée Beyrouth, et soumise à Antioche. Dans cette ville, il y avait une multitude innombrable d’Hébreux, si bien qu’en ces temps la ville tenait le rang de métropolitaine. Il arriva qu’un chrétien obtint un logement proche de la synagogue des Hébreux, qui passait pour très importante, de la part d’un homme à qui il en paya le revenu. Alors qu’il entra dans sa demeure, il fixa l’icône de notre Seigneur Jésus-Christ, qu’il avait avec lui, sur le mur faisant face à son lit ; cette image contenait la figure entière du Seigneur. Après une courte période, l’homme se trouva contraint de chercher une plus grande demeure dans un autre endroit de la même ville, afin d’y vivre. Quand il l’eut trouvée, croyant emporter tout ce qui lui appartenait, il quitta son logement. Mais ce faisant, la providence du Seigneur fit qu’il y laissa par négligeance l’icône de notre Seigneur Jésus-Christ. Cela fut accompli par le conseil secret du Seigneur, qui veut que tous les hommes soient sauvés et parviennent à la connaissance de la vérité, afin de montrer à tous ceux qui l’adorent la puissance de ses miracles, pour obtenir la conversion des impies, et pour le soutien de ses fidèles. Et il arriva, après cela, qu’un Hébreu s’installa dans la même maison. » (« Est quaedam civitas in Syria, inter terminos Tyri et Sidonis posita, Berytus vocata, Antiochiae vero subdita. In hac urbe innumerabilis multitudo erat hebraeorum quamvis eodem tempore civitas metropolitana obtineret dignitatem. Accidit autem, ut juxta synagogam hebraeorum quae magna valde habebatur, quidam christicola a quodam suscepisset cellulam censumque ei ex a redderet. In qua dum ingressuss esset ad habitandum, iconam Domini nostri Jesu Christi, quam apud se habebat, fixit in pariete contra lectuli sui faciem, quae etiam continebat in se integram Domini staturam. Evoluto denique non parvo temporis spatio, jam praelibatus deicola perquirere studuit in alio loco ejusdem urbis spatiosam domum ad habitandum. Quam cum reperisset, tollens cuncta, quae ad se pertinere videbantur, egressus est de cellula. Domini autem providentia id agente, Jesu Christi Domini nostri iconam ibi neglectam reliquit. Hoc autem Domini occulto peractum est consilio, qui vult omnes homines salvos fieri, et ad agnitionem veritatis venire, ut ostenderet cunctis se colentibus suorum miraculorum virtutem a increpationem impiorum firmamentum quoque suorum fidelium. Factum est autem post haec, ut hebraeus quidam eamdem cellulam susciperet ad habitandum. ») Athanasii Archiepiscopi Alexandrini, De passione imaginis Domini Nostri Jesu Christi, qualiter crucifixa est in Beryto, Syriae civitate libellus, dans Jacques-Paul Migne, Patrologiae Cursus Completus, Series Graeca, op. cit., col. 813-814.
18 Michele Bacci, “The Berardenga Antependium and the Passio Ymaginis Office”, Journal of the Warburg and Courtauld Institutes, Vol. 61, 1998, p. 15.
19 En l’an 1003, l’église abbatiale avait, pour la seconde fois, été solennellement dédiée à la fois au Sauveur et à saint Alexandre, tous deux commémorés comme saints Patrons des lieux depuis 881.
20 Voir, par exemple, les retables franciscains tels le San Francesco e storie della sua vita peint par Guido di Graziano (Pinacothèque nationale de Sienne).
21 Michele Bacci, « The Berardenga Antependium and the Passio Ymaginis Office », op. cit., p. 16.
22 Barbara Baert, « The Retable of the Master of Tressa (Siena I215). Iconography and Function », Pantheon, Internationales Jahresbuch für Kunst, LVIl, Munich, 1999, pp. I4-21.